Sescho a écrit :Ce que je vois c'est beaucoup de déchets, vraiment beaucoup.
tu as tout à fait le droit d'appeler mes arguments des "déchets". Mais je ne pourrai les considérer moi-même ainsi qu'à partir du moment où tu donnes concrètement des arguments rationnels qui réfutent les miens.
Sescho a écrit :Si je donne un lien en disant qu'il répond c'est qu'il répond.
bien sûr, si tu donnes un lien, tu trouves toi-même qu'il répond. Mais si je te dis que pour moi il ne répond pas à MON argument, c'est que je ne vois pas où se trouve, dans ce lien, la réponse concrète à mes arguments à moi. Si le but est de trouver la vérité, c'est-à-dire une interprétation rationnelle capable de mettre tous d'accord, alors il est nécessaire que les deux interlocuteurs acceptent la rationalité de l'argument. Si elle ne vaut que pour l'un des deux, le risque est grand, je crains, que l'argument ne soit pas très solide.
Sescho a écrit :Je sais que c'est plus dur de réfléchir sur les textes, des autres ou de Spinoza, que d'écrire à l'inspiration à l'envi, mais quand-même. Du coup cela m'oblige a refaire un travail déjà fait.
Le jour où tu as le temps de lire ma réponse détaillée à ton message d'il y a deux jours, tu verras que je n'ai fait que cela: une analyse rationnelle du texte, non pas de grands extraits en énonçant des choses générales sans montrer l'essentiel, c'est-à-dire les liens logiques entre le texte et mon interprétation, mais du texte phrase par phrase, commenté phrase par phrase. Toute objection concrète à cette analyse est toujours la bienvenue.
Quand à l'idée de refaire un travail déjà fait: en tout respect de ta position, pour moi elle est assez étrange. Comme si une seule discussion sur un passage de Spinoza suffit pour pouvoir déjà prévoir toutes les objections que n'importe quel lecteur peut avoir. Si c'était le cas, on n'aurait plus besoin de commentateurs de Spinoza aujourd'hui, le premier commentateur aurait déjà tout dit. Je te demande donc moins de refaire le même travail que de m'expliquer en quoi tu n'es pas d'accord avec mes arguments à moi, si tu veux bien.
Sescho a écrit : Je vais le refaire, mais fais-moi plaisir : dans ta réponse, mets-moi ton commentaire étendu de E5P36S en deuxième partie.
je t'en remercie. Ayant compris que des messages longs ne servent à rien, je vais néanmoins me limiter ici à ce que tu viens d'écrire, tout en répétant que revenir sur la P36 en oubliant tout ce que j'ai déjà donné comme arguments pour repartir "from scratch" de ton dernier message à ce sujet, me convient parfaitement. Il est donc certain que je le ferai, et avec plaisir.
louisa a écrit:
E5P24: "Plus nous comprenons les choses singulières, plus nous comprenons Dieu".
Ceci, bien sûr, n'indique pas encore que nous pouvons comprendre les choses singulières par le troisième genre de connaissance. Mais la proposition suivante dit:
"Le troisième genre de connaissance procède à partir de l'idée adéquate de certains attributs de Dieu vers la connaissance adéquate de l'essence des choses (...); et plus nous comprenons les choses de cette manière (PAR LA PROP. PRECEDENTE), plus nous comprenons Dieu, et partant, la suprême vertu de l'Esprit, c'est-à-dire puissance ou NATURE DE L'ESPRIT, autrement dit son suprême effort, c'est de connaître les choses par le troisième genre de connaissance".
Il est clair que donc l'E5P24 dit que plus nous connaissons les choses singulières par le troisième genre de connaissance, plus nous comprenons Dieu. Tandis que la proposition suivante, E5P25, appelle cette compréhension spécifique de Dieu la NATURE de notre Esprit. Par conséquent, c'est dans la NATURE de notre Esprit même de connaître les choses singulières par le troisième genre de connaissance.
Sescho:
Non. D'abord - ce n'est pas tout-à-fait anodin - la référence à la proposition précédente se trouve après le "plus" et non avant.
ok, si tu trouves que cela change quelque chose à mon argumentation: QU'EST-CE QUE cela change? En quoi est-ce que cela invalide selon toi ma conclusion?
Sescho a écrit :Ensuite, tu opères une contraction qui n'est pas incontournable. Bardamu, qui était exactement dans la même position que toi (car je le répète le sujet a déjà été entièrement traité dans le lien que j'ai donné), l'a faite de la façon neutre :
bardamu a écrit:
Si je rajoute la proposition 24, ça nous donne : cette vertu est d'autant plus grande que l'Ame connaît plus les choses par le 3e genre de connaissance étant donné que plus nous connaissons les choses singulières, plus nous connaissons Dieu.
Et ma réponse a été :
sescho a écrit:
Mais je suis d'accord avec cela. Le seul problème est que cela ne prouve pas pour autant (il suffit de relire ton passage) que nous connaissons adéquatement les choses singulières. "Plus nous connaissons de choses singulières" ne veut pas dire "plus nous connaissons adéquatement de choses singulières".
merci d'avoir repris ces passages. Je les avais lu, mais je ne comprends pas comment tu peux en déduire qu'il s'agirait peut-être d'une connaissance inadéquate. Si tu dis que tu es d'accord avec l'argument de bardamu et de moi-même (qui revient effectivement au même), dire qu'ici il n'est pas prouvé que cette connaissance du troisième genre des choses singulières que nous avons selon l'E5P25 (et tu dis être d'accord pour lire la P25 ainsi), est adéquate, c'est nier le fait que le troisième genre de connaissance ne comporte par définition (E2P40 sc.II) QUE des idées adéquates.
Sescho a écrit :On n'a pas le droit d'ajouter "singulière" à "chose."
l'argument de moi-même et de Bardamu prouve justement qu'on n'a pas le droit d'élargir, dans l'E5P25, les "choses" dont il est question à d'autres choses qu'à des choses singulières, puisque la démonstration se base sur la P24, où il n'est question QUE de choses singulières. Comment peux-tu dire être d'accord avec cet argument, pour dire ensuite ce qui est tout de même exactement l'inverse, non?
Sescho a écrit : De nombreux passages montrent que Spinoza emploie "chose" dans le sens général "quelque chose" (et non pas rien) et en particulier alors qu'il est clair qu'il ne s'agit pas de choses singulières. Par exemple :
E2P38C : tous les corps se ressemblent en certaines choses.
je ne vois pas ce qui te fait dire qu'ici il ne s'agirait pas de choses singulières, mais effectivement, il faudrait refaire un tout autre raisonnement que celui appliqué aux P24-25 si l'on veut montrer ici aussi qu'il s'agit de choses singulières. Toujours est-il que ce en quoi les corps se ressemblent donne lieu au deuxième genre de connaissance, qui pour l'instant, à ce stade-ci, n'est pas le sujet de notre discussion. Ici, il s'agit uniquement de montrer que ce qui est connu adéquatement par le troisième genre, ce sont les essences des choses singulières (et deuxièmement, les essences singulières des choses singulières, mais nous n'en sommes pas encore là).
Sescho a écrit :Or Spinoza avait tout le loisir de l'ajouter lui-même cet adjectif, "singulière", comme dans la proposition juste avant : "c'est de connaître les choses [singulières] par le troisième genre de connaissance". Mais il ne l'a pas fait...
comme tu le suggères toi-même, qu'il ne l'a pas fait ne prouve pas grand-chose. Il peut trouver que c'est déjà clair en soi, puisqu'il répète souvent qu'il n'y a rien hors les attributs et leurs modes. Cela ne laisse pas beaucoup de place pour d'autres "choses" que les choses singulières, partout où il ne parle clairement pas des attributs. Mais on peut laisser cette question ouverte, si tu le préfères. Elle est en tout cas plus générale que ce dont nous discutons: est-ce qu'une connaissance adéquate du troisième genre des essences des choses singulières est possible ou non? Les P24-25 obligent à répondre par "oui", il me semble, non?
Cordialement,
louisa