C'est peut-être la faute à Deleuze et Guattari.
Dans "Qu'est-ce que la philosophie ?", ils définissent la philosophie comme l'activité de création de concept. Je ne sais pas si quelqu'un l'avait fait avant, mais c'est une définition très pratique pour se situer par rapport aux sciences (création de "fonctions") et aux arts (créations d'affects et percepts). Ca permet aussi de distinguer entre le professeur de philosophie (j'ai entendu je ne sais plus qui parler de "philophilosophe) et le philosophe, l'un n'excluant pas l'autre, bien sûr.
Un extrait :
La philosophie ne consiste pas à savoir, et ce n'est pas la vérité qui inspire la philosophie mais des catégories comme celles d'Intéressant, de Remarquable ou d'Important qui décident de la réussite ou de l'échec. Or on ne peut pas le savoir avant d'avoir construit. De beaucoup de livres de philosophie on ne dira pas qu'ils sont faux, car ce n'est rien dire, mais sans importance ni intérêt, justement parce qu'ils ne créent aucun concept, ni n'apportent une image de la pensée ou n'engendre un personnage qui vaille la peine. Seuls les professeurs peuvent mettre "faux" dans la marge, et encore, mais les lecteurs ont plutôt des doutes sur l'importance et l'intérêt, c'est-à-dire la nouveauté de ce qu'on leur donne à lire. Ce sont les catégories de l'Esprit. Un grand personnage romanesque doit être un Original, un Unique, disait Melville; un personnage conceptuel aussi. Même antipathique, il doit être remarquable ; même répulsif, un concept doit être intéressant.(...)
On ne fait rien de positif, mais rien non plus dans le domaine de la critique ni de l'histoire, quand on se contente d'agiter de vieux concepts tout faits comme des squelettes destinés à intimider toute création, sans voir que les anciens philosophes auxquels on les emprunte faisaient déjà ce qu'on voudrait empêcher les modernes de faire : ils créaient leurs concepts, et ne se contentaient pas de nettoyer, de racler des os, comme le critique ou l'historien de notre époque. Même l'histoire de la philosophie est tout à fait inintéressante si elle ne se propose de réveiller un concept endormi, de le rejouer sur une nouvelle scène, fût-ce au prix de le tourner contre lui-même.
Je n'ai pas lu Comte-Sponville mais si des lecteurs le trouve intéressant c'est sans doute qu'il leur apporte quelque chose de nouveau.
Que dit-il d'intéressant ?