La locution "cause de soi" peut surprendre, mais son sens est assez clair. Comme
rien ne vient de rien, on peut en déduire que tout a une cause, et par conséquent qu'il y a une régression des causes à l'infini. Ceci - une infinité de cause -, en passant, peut être accepté abstraitement, mais est loin d'être pensable de façon claire et distincte. Spinoza dit : non ; il y a une alternative : ce qui arrête la régression, c'est la "chose" qui existe, mais sans cause - ou, autrement dit, par référence au
rien ne vient de rien, qui est cause de soi - ; en toute conséquence, elle existe alors éternellement (et l'existence appartient alors nécessairement à son essence).
Spinoza, Ethique, traduit par E. Saisset, a écrit :E1D1 : J’entends par cause de soi ce dont l’essence enveloppe l’existence, ou ce dont la nature ne peut être conçue que comme existante.
En langage courant, à la question : "pourquoi la Nature existe ?" ou "qui a créé la Nature ?" (si vous me répondez "Dieu", je vous demande : qui a créé Dieu ?), la réponse la plus claire à l'esprit est : elle existe, c'est tout ; elle existe par elle-même.
La transition est trouvée vers "en soi", "par soi" et éventuellement "pour soi", qui ont la même racine. On le comprend mieux en les opposant à ce qui existe "en autre chose" : un humain existe dans la Nature mais il n'y a rien de plus "grand" dans lequel la Nature existe : la Nature existe en elle-même. De même l'Homme ne se conçoit que par la Nature, tandis que la Nature se conçoit par soi ("en soi" et "par soi" vient du parallèle "être" et "pensée", "être" et "être conçu" (dans la pensée)) Quant au "pour soi", moins fréquemment employé - pas sûr chez Spinoza -, j'avancerais que l'Homme a une fin mais la Nature dans son ensemble non : elle est "pour soi" simplement en tant qu'elle est, nécessairement.
Amicalement
Serge
Connais-toi toi-même.