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Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Messagepar Vanleers » 29 janv. 2013, 17:00

A Hokousai
1) Je ne comprends pas bien ce que vous écrivez à propos de l’éternité.
Est-ce que vous dites que l’enchaînement des causes et des effets dans la durée étant strictement déterministe selon Spinoza, ce déterminisme, autrement dit cette nécessité, est un autre nom de l’éternité ?
Spinoza aurait-il dit la même chose que ce que dira plus tard Laplace ? :
« Une intelligence qui, à un instant donné, connaîtrait toutes les forces dont la nature est animée, la position respective des êtres qui la composent, si d’ailleurs elle était assez vaste pour soumettre ces données à l’analyse, embrasserait dans la même formule les mouvements des plus grands corps de l’univers, et ceux du plus léger atome. Rien ne serait incertain pour elle, et l’avenir comme le passé seraient présents à ses yeux. »

2) Sur l' interprétations de Sévérac de la lettre 32

A mon point de vue, Spinoza essaie de décrire ce que j’appellerai l’auto-organisation de l’univers, sans avoir les moyens, il le dit lui-même au début de la lettre, d’en comprendre la complexité.
Pascal Sévérac me paraît avoir vu qu’il s’agit en effet d’un problème d’auto-organisation d’un système complexe.
John Von Neumann a dit que les sciences de la complexité seraient les sciences du XXI° siècle. Nos petits-enfants auront peut-être d’autres outils conceptuels pour aborder cette question qui, sur le plan éthique, ne me paraît pas fondamentale.

Bien à vous

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Messagepar hokousai » 29 janv. 2013, 23:33

à Vanleers

sur votre dernier message

Est-ce que vous dites que l’enchaînement des causes et des effets dans la durée étant strictement déterministe selon Spinoza, ce déterminisme, autrement dit cette nécessité, est un autre nom de l’éternité ?


Mais non, je dis que l'éternité doit être référée à la nécessité d' exister et justement pas au déterminisme.
Cela dit c'est la finitude qui est pensée mais sous une espèce d'éternité .
(PF Moreau dixit C Jaquet parle de la finitude comme acès à l'éternité,mais je ne l' ai pas pas lu.)
...............
Bon .. Sevérac n'est quand même pas le premier à avoir pensé à l 'auto-organisation d' un système complexe. Cela dit quand Spinoza par d' automate ( dans le TRE) c'est plutôt dépréciatif et pourtant on disserte fort sur l'automate chez Spinoza .
Qui plus est sur l automate spirituel alors qu'il ne dit pas "automata" mais "automa spirituale"(85 trad:Koyre).(automa est un néologisme et pose un problème)

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Messagepar hokousai » 30 janv. 2013, 00:39

à Vanleers sur le message Posté le: 29/01/2013 16:59

J 'ai bien des difficultés avec les textes de Sévérac!

« Or être une « partie » de l’entendement divin a deux sens.

Certains Spinozistes s' auto-attribuent " largement "l' éternité du fait qu' ils pensent avoir des idées que Dieu a, ainsi une parmi d'autres.
Pourtant si Dieu en tant qu 'il constitue l' esprit humain a telle ou telle idée et aussi en tant qu''il a en même temps que l'esprit humain également l'idée d'une autre chose alors l'esprit humain perçoit les choses en partie autrement dit de manière inadéquate.(prop11/2)
Est-ce ce là le sens de notre esprit en tant qu'il comprend ( scolie 40/5)?
………………..
La seconde citation porte sur les idées adéquates .( Je n'ai rien à critiquer sur le rationalisme attribué à juste titre à Spinoza )
La nécessité de la raison est en revanche celle de la pensée divine en tant qu’elle constitue l’essence du seul esprit : l’esprit est donc rationnel lorsqu’il pense à travers des lois qu’il comprend, au double sens de lois qui sont les siennes et qu’il saisit clairement et distinctement.
d 'accord en tant qu’elle constitue l’essence du seul esprit humain.
Il me semble néanmoins que comprendre sous un espèce d'éternité ce n'est pas simplement être rationnel (par exemple regarder les choses en relation à un temps et un lieu précis /second genre de connaissance ). Et il me semble que Sévérac aligne le troisième genre sur le second .

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Messagepar Vanleers » 30 janv. 2013, 15:28

A Hokousai
1) Vous écrivez :
« je dis que l'éternité doit être référée à la nécessité d'exister et justement pas au déterminisme. »

Dans le monde laplacien où tout est déterminé, ce qui est également le cas dans le monde spinozien, pour l’Intelligence qui « connaîtrait toutes les forces dont la nature est animée… », le temps aurait disparu car « l’avenir comme le passé seraient présents à ses yeux ».
La vision de cette Intelligence serait sub specie aeternitatis. « De toute éternité », toute chose serait déterminée à exister nécessairement selon les lois du déterminisme.
Je ne vois donc pas de différence entre exister par nécessité et exister par détermination à exister.

2) J’aimerais prolonger la réflexion sur le corollaire de E II 11.

Lorsque son chat vient sur ses genoux et que l’idée du chat se forme dans l’esprit de Sévérac, la cause de cette idée, ce n’est pas le chat mais une autre idée. En vertu de E II 11 cor. :
L’idée du chat dans l’esprit de S. sera adéquate si Dieu, en tant qu’il constitue l’essence de l’esprit de S., a cette idée.
L’idée sera inadéquate si Dieu a cette idée, « non seulement en tant qu’il constitue la nature de l’esprit de S., mais en tant qu’il a en même temps que l’esprit de S. également l’idée d’une autre chose ».

Dans le premier cas (idée adéquate), cette idée dans l’esprit de S. se comprend clairement et distinctement par l’esprit de S. uniquement, donc l’esprit de S. est cause adéquate de l’idée adéquate de son chat (E III déf. 1)
Dans le deuxième cas (idée inadéquate), cette idée dans l’esprit de S. ne peut pas se comprendre clairement et distinctement par l’esprit de S. uniquement, donc l’esprit de S. est cause inadéquate de l’idée inadéquate de son chat.

Examinons ces deux types de causalité et donc de détermination de l’esprit de S..

a) Lorsque S. a une idée inadéquate de son chat, son esprit est déterminé par « les idées qui, dans l’entendement divin, complètent la perception tronquée, partielle, inadéquate [qu’il a] du chat ». L’esprit de S. n’est que cause partielle, c’est-à-dire inadéquate de l’idée du chat.
b) Lorsque S. a une idée adéquate du chat, c’est son entendement qui conçoit l’idée du chat. Devons-nous dire que cet entendement n’est pas extérieurement déterminé ?
Ce serait être en contradiction avec E V 40 sc. qui dit que les entendements se déterminent mutuellement au sein de l’entendement infini de Dieu, qu’ils constituent. Et pourtant, nous avons vu que l’esprit de S. est cause adéquate de l’idée du chat.
La solution est de dire que l’idée du chat dans l’esprit de S. s’explique en effet par la détermination des autres entendements mais s’explique aussi par le seul entendement de S.. Autrement dit, l’entendement de S. et les autres entendements font « cause commune ». C’est ce qu’écrit Pascal Sévérac (p. 74) :
« Le geste par lequel l’entendement humain est compris comme éternel est un geste d’union : union en premier lieu avec cette chose éternelle qu’est Dieu, sa cause immanente ; mais union aussi avec d’autres modes éternels, c’est-à-dire avec les autres entendements qui le déterminent à penser adéquatement - sans, bien évidemment, le borner en aucune manière.
Il ne s’agit plus alors de comparer ou de rapporter de façon extrinsèque l’entendement humain à d’autres entendements, mais de comprendre le rapport intrinsèque qui les lie tous ensemble. L’entendement humain devient alors une partie unie à d’autres parties éternelles qui, bien loin de le limiter, lui conviennent pour composer un tout plus grand, plus puissant : aucun entendement, c’est-à-dire aucun esprit en tant qu’il fait acte de comprendre, ne saurait en limiter ou en nier un autre. Mais étant déterminé par lui à comprendre, n’importe quel entendement forme avec lui un tout plus puissant, qui peut toujours s’accroître, à l’infini. »

3) J’ajouterai encore ceci.
Lorsque Spinoza parle de parts ou de parties (l’entendement et l’imagination comme « parts » de l’esprit (E V 40 cor.) ; l’Esprit humain comme « partie » de l’intellect infini de Dieu (E II 11 cor.)), nous devons résister à la tendance à imaginer ces partitions sur un modèle spatial. En E I 15 sc. Spinoza a rappelé qu’un attribut, notamment l’Étendue, n’est pas divisible et, écrit P. Sévérac, ce qui vaut pour l’infinité des attributs vaut pour l’infinité des modes (p. 75).

Bien à vous

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Messagepar hokousai » 30 janv. 2013, 20:15

cher Vanleers

Je ne vois donc pas de différence entre exister par nécessité et exister par détermination à exister.

Il faudrait commenter la fin de la lettre sur l'infini. Dans l'enchainement les choses sont déterminées mais pas déterminées à exister par d'autres choses ...lesquelles n'existent pas nécessairement mais sont déterminées par d'autres choses ... et ceci à l'infini.
Mais ces choses sont déterminées à exister par une chose qui elle existe nécessairement ( causa sui ).
Si vous ne voyez pas la différence alors il n'y a rien à voir sous une espèce d'éternité .(voir prop 30/5 démonstration :en tant quelles enveloppent par l 'essence de Diueu, l'existence

......................

La cause de l'idée du chat!
Pour moi c'est l' affection du corps en ce qu'un corps extérieur( celui du chat ) entre en commerce avec mon corps. L'idée représente plus les affections du corps que le corps extérieur. Idée inadéquate.

amicalement
hokousai

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Messagepar hokousai » 31 janv. 2013, 00:30

Sévérac a écrit :–aucun entendement, c’est-à-dire aucun esprit en tant qu’il fait acte de comprendre, ne saurait en limiter ou en nier un autre. Mais étant déterminé par lui à comprendre, n’importe quel entendement forme avec lui un tout plus puissant, qui peut toujours s’accroître, à l’infini. »

Non il ne peut pas s'accroitre, à l'infini. Pour parler simplement une communauté d' individus rationnels ne peut prétendre à l 'expansion infinie .
Il y a véritablement chez Sévérac une confusion d échelle (si j'ose dire ).
(voir la parabole du chien céleste et du chien animal) .
.............................
pour en revenir à un texte cité plus bas(sur les idées adéquates )
La nécessité de la raison est en revanche celle de la pensée divine en tant qu’elle constitue l’essence du seul esprit : l’esprit est donc rationnel lorsqu’il pense à travers des lois qu’il comprend, au double sens de lois qui sont les siennes et qu’il saisit clairement et distinctement. L’esprit pense adéquatement lorsqu’il pense selon une nécessité interne, qu’il suit en toute connaissance de cause. »
oui mais seulement en tant qu' elle constitue l'essence du seul esprit humain. Admettons le rationalisme . Quant à le diviniser ?

La position théorique ( et puis pratico-pragmatique ) de Spinoza sur la Vérité demanderait certains commentaires critiques. Cette théorie est au fondement de l'idée d' idée adéquate.
Spinoza avoue qu'il ne sait pas le pourquoi et le comment de la certitude.
On n'en est donc pas (même dans la rationalité ) à penser à travers des lois que nous comprenons.

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Messagepar Vanleers » 31 janv. 2013, 14:32

A Hokousai
1) Vous écrivez :
« Mais ces choses sont déterminées à exister par une chose qui elle existe nécessairement ( causa sui )."

Oui, et on peut se référer au scolie de E II 45 :
« Car quoique chacune d’elles [les choses singulières] soit déterminée par une autre chose singulière à exister d’une manière précise, il reste que la force par laquelle chacune persévère dans l’exister suit de l’éternelle nécessité de la nature de Dieu. »
Ce scolie se réfère lui-même au corollaire de E I 24 dans lequel Spinoza écrit que « Dieu est causa essendi des choses ».
Citer la démonstration de E V 30 est également opportun.
Lorsque vous écrivez que « l'éternité doit être référée à la nécessité d' exister et justement pas au déterminisme. », il faut donc comprendre qu’il s’agit de « l’éternelle nécessité de la nature de Dieu. »

2) Vous écrivez :
« La cause de l'idée du chat!
Pour moi c'est l' affection du corps en ce qu'un corps extérieur( celui du chat ) entre en commerce avec mon corps. L'idée représente plus les affections du corps que le corps extérieur. Idée inadéquate. »

Erreur fatale !
Voyez par exemple la fin du scolie de E II 7 :
« […] en sorte que, aussi longtemps que l’on considère les choses comme des manières de penser, nous devons expliquer l’ordre de la nature tout entière, autrement dit l’enchaînement des causes, par le seul attribut de la Pensée […] »
Ou encore plus clairement E II 5 :
« L’être formel des idées reconnaît pour cause Dieu en tant seulement qu’on le considère comme chose pensante, et non en tant qu’il s’explique par un autre attribut. C’est-à-dire, les idées tant des attributs de Dieu que des choses singulières reconnaissent pour cause efficiente non pas ce dont-elles sont les idées, autrement dit les choses perçues, mais Dieu lui-même en tant qu’il est chose pensante »

3) Je voudrais prolonger la réflexion à propos du corollaire de E II 11.
Ce corollaire est une pierre d’attente du scolie de E V 40 dans lequel Spinoza expose la constitution de l’entendement infini de Dieu. Nous comprenons alors que les entendements finis sont unis entre eux dans l’entendement infini de Dieu.
Sévérac a raison d’écrire qu’un entendement détermine un autre entendement à penser adéquatement : « aucun entendement, c’est-à-dire aucun esprit en tant qu’il fait acte de comprendre, ne saurait en limiter ou en nier un autre. »
Ceci est même un fait d’expérience courante : la joie d’avoir compris quelque chose appelle la joie de faire comprendre cette chose à un autre.
Entre E II 11 cor. et E V 40 sc., on peut voir les propositions E IV 36 et 37 comme un relais.
En E V 36, Spinoza écrit, en se référant à E II 26 (« Tout ce à quoi nous nous efforçons par raison, ce n’est rien d’autre que comprendre »), que « le souverain bien de ceux qui suivent la raison, c’est de connaître Dieu, c’est-à-dire un bien qui est commun à tous les hommes et que tous les hommes, en tant qu’ils sont de même nature, peuvent posséder également. »
En E V 37, il écrit :
« Le bien auquel aspire pour soi chaque homme qui suit la raison, il le désirera aussi pour tous les autres hommes, et d’autant plus qu’il possédera une plus grande connaissance de Dieu »

La clef de la béatitude, n’est-ce pas la vision sub specie aeternitatis de l’union des entendements dans l’entendement infini de Dieu ?

Bien à vous

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Messagepar hokousai » 31 janv. 2013, 22:08

à Vanleers

Erreur fatale !
J'espérais bien que vous me citiez ce que vous me citez. Ce que vous me citez a conduit à attribuer un strict parallélisme à Spinoza.
Or l'idée d 'union de l'esprit et du corps laisse peser de forts doutes sur le supposé parallélisme.
Si je vous ai dit "pour moi" c'est que c'est" pour moi . Pour Spinoza je ne sais pas exactement.
Mais pour remettre en question le parallélisme strict il n' y a pas à chercher très loin.
prop 18/1 dem:
"L esprit s'il imagine un corps , la cause en est que le corps humain se trouve affecté et disposé par les traces d' un corps extérieur de la même manière qu'il fut ..etc"

Dans le scolie Spinoza distingue deux enchaînements et e distingue expressément l'enchainement des idées qui se fait suivant l'ordre de l'intellect grâce auquel l'esprit perçoit les choses par leurs premières causes et qui est le même chez tous les hommes.

Donc l' idée du chat chez Sévérac ne relève pas de cet ordre de l'intellect. Voila se que je voulais vous faire sentir et vous m'accorderez, je l'espère, que je suis pas dans une si fatale erreur.
................................................

Sévérac a raison d’écrire qu’un entendement détermine un autre entendement à penser adéquatement : « aucun entendement, c’est-à-dire aucun esprit en tant qu’il fait acte de comprendre, ne saurait en limiter ou en nier un autre. »


Si vous voulez. Sévérac ne peut avoir toujours tort. Cela dit je le trouve bien optimiste. Tous raisonnant et fort bien, les philosophes n' ont cessé de se combattre, de ne nier et de se limiter les uns les autres.
...................................................

La clef de la béatitude, n’est-ce pas la vision sub specie aeternitatis de l’union des entendements dans l’entendement infini de Dieu ?


Ça c'est la communion des saints .

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Messagepar hokousai » 01 févr. 2013, 00:03

àVanleers

Je relève dans un texte sur le problème de la vérité chez Spinoza (ça na pas de rapport direct avec le sujet de l'article mais avec notre débat )

"je cite ""
"13. Selon Spinoza, le contraste entre l’existence éternelle et l’existence temporelle n’est pas un contraste entre l’existence possible et l’existence actuelle, mais entre deux types d’existence actuelle. L’actualité éternelle de l’essence d’un mode fini qui n’existe pas dans le temps n’est que la propriété actuelle qui appartient à l’attribut divin de produire nécessairement ce mode quand les conditions sont remplies. Cette propriété est une combinaison particulière des lois de la nature.’
"""""

Je ne suis pas vraiment d'accord avec ça . La description ressemble fort à ce que les scolastiques appellent l 'en puissance de . En dépit du deni de l'existence possible et de l'affirmation de l' actuel.

Les conditions qui sont remplies causent l' expression pré programmée de l'attribut (sous forme d'une propriété / combinaison particulière de la nature ). L attribut est en puisssance ( nommée ici actualité éterrnelle ) de produire le mode quand les conditions de son expression sont réalisées. Je ne suis pas persuadé que Spinoza le comprenait ainsi .

http://edph.univ-paris1.fr/phs5/gleizer.pdf

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Messagepar Vanleers » 01 févr. 2013, 11:56

A Hokousai
Vous écrivez :
« Mais pour remettre en question le parallélisme strict il n' y a pas à chercher très loin. prop 18/1 dem »

Vous donnez ensuite le début de la traduction de Pautrat : « L’Esprit (par le Coroll. Précéd.), s’il imagine un corps, la cause en est que le Corps humain […] »
Misrahi traduit par : « L’Esprit (par le Corol. Précédent) imagine un corps en raison du fait que le Corps humain […] »
Guérinot traduit par : « L’esprit (selon le corollaire précédent) imagine un corps pour cette raison que le corps humain […] »
Déjà, Misrahi et Guérinot me semblent donner moins de poids à votre thèse.

Ensuite, dans sa démonstration, Spinoza se réfère au corollaire de E II 17 :
« Les corps extérieurs par lesquels le Corps humain a été une fois affecté, l’Esprit pourra, même s’ils n’existent pas ou ne sont pas présents, les contempler pourtant comme présents »
« L’Esprit pourra […] », c’est également ainsi que traduisent Misrahi et Guérinot, ce qui, à mon point de vue, affaiblit encore la thèse selon laquelle le corps serait cause d’une idée.

Enfin, je cite le commentaire de Macherey de E II 18 (Introduction … II p. 190).
Il expose que les « liaisons rationnelles que l’intellect effectue activement entre les choses » s’effectuent dans des :
« […] conditions complètement différentes de celles qui expliquent la formation de ces associations spontanées, dans lesquelles l’âme semble suivre passivement le corps, non en ce sens qu’elle subit une action qu’il exercerait sur elle, mais parce qu’elle forme ses idées sur le même modèle qui régit circonstanciellement selon l’occasion des rencontres, les combinaisons entre les affections du corps : c’est ainsi que la représentation d’une même chose peut être, selon les individus, associée à d’autres représentations évoquant des choses de natures complètement différentes : en voyant la trace d’un sabot de cheval, un paysan pensera spontanément à ses labours, un soldat à des combats, etc. [E II 18 sc.] »

Il faut rappeler qu’une cause, c’est ce qui explique un effet (E III déf 1).

L’âme forme, ici, des idées sur un modèle corporel mais on ne peut pas dire que le corps explique, c’est-à-dire est la cause de la formation de telle ou telle idée particulière qui sera différente pour chaque individu (le paysan, le soldat, etc.).

Je donnerai maintenant une longue citation de Sévérac (pp. 87-88) :

« Une telle affirmation a bien évidemment quelque chose de contre-intuitif : n’est-ce pas parce que ce chat ronronne sur mes genoux que j’en ai l’idée, que je le perçois au moins par la vue et l’ouïe ? Quelles peuvent bien être ces autres idées qui produisent en mon esprit celle du chat qui ronronne, si ce n’est l’existence matérielle du chat lui-même ? Admettons, contre la doctrine spinoziste, que nous puissions rendre compte de la présence de l’idée du chat en mon esprit par l’existence corporelle, en dehors de mon esprit, de ce chat. Il faudra néanmoins convenir que ce chat est corporellement présent, car il est venu à moi ; et que je le perçois ronronner sur mes genoux, car je dispose des organes des sens pour faire une telle expérience. Mais tout cela, comment puis-je le savoir, si ce n’est à travers certaines idées, en l’occurrence celle de la venue du chat à moi et celle de la présence d’organes sensoriels en moi ? Seules certaines idées de « choses » peuvent expliquer en mon esprit la présence d’une idée de « quelque chose », de la même manière que ces « choses » expliquent la présence de « quelque chose » en dehors de moi : je ne puis en tout cas « sortir » d’une idée, afin d’en expliquer la genèse, que pour trouver d’autres idées. L’extériorité d’une idée singulière, c’est-à-dire d’une idée finie et ayant une certaine durée, est constituée par d’autres idées, elles-mêmes finies et ayant une durée déterminée. Ce qui existe à l’extérieur d’une idée, ce n’est pas un corps, c’est une autre idée : je ne peux m’expliquer l’idée de quelque chose que par les idées d’autres choses.
Ainsi, ce qui paraissait avoir un caractère contre-intuitif recouvre désormais une plus grande clarté : l’existence d’une idée n’est pas expliquée par l’existence de son objet ; on ne sort pas du champ des idées pour expliquer la formation d’une idée.
Mais alors tombons-nous dans une espèce d’immatérialisme, qui voudrait que toute réalité soit ou bien perçue, ou bien percevante ? Non, puisqu’en vertu de l’union substantielle des attributs, la réalité qui se donne selon la pensée se donne aussi selon d’autres attributs, notamment l’étendue. Il existe donc une relation entre modalités d’attributs différents : s’il ne peut y avoir de rapport de causalité entre les idées et les choses qui en sont les objets, il doit y avoir néanmoins un rapport d’identité entre l’enchaînement des idées et l’enchaînement de leurs objets. En effet, alors que le rapport de causalité est interdit par la distinction réelle des attributs divins, le rapport d’identité entre les logiques parcourant chaque attribut est rendu nécessaire par l’union des attributs en Dieu : l’ordre et la connexion des modalités sont nécessairement les mêmes en chaque attribut, puisque tous expriment l’unique nécessité de la productivité divine. »

Bien à vous


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