Spinoza et l'expérience

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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Messagepar J » 20 mai 2009, 11:55

Je suis une idée, mais la vérité de l'idée que je suis ne m'est pas accessible, car je ne la saisis que dans et par les affections de mon corps.

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Messagepar alcore » 20 mai 2009, 12:07

J a écrit :Je suis une idée, mais la vérité de l'idée que je suis ne m'est pas accessible, car je ne la saisis que dans et par les affections de mon corps.


En quoi cela fait il obstacle à la vérité ?
L'essence vraie que je suis se révèle à mesure que je développe des rapports affectifs de composition avec les rapports de mon corps et des autres corps. La vérité que je suis m'est accessible dès que j'accrois et éprouve que j'accrois ma puissance de penser et d'agir. Tout ce qui nous fait penser, et agir renforce notre vérité.
Spinoza distingue et associe l'essence qualitative et les rapports extérieurs dans lesquels elle est prise. Ce n'est pas en se retranchant du monde que l'on accroît sa puissance. La vérité de ce que je suis est égalemenbt une affection de la substance. Je suis une affection et c'est comme tel que je peux être affecté et affecter.
Chacun a d'ores et déjà une vérité et elle lui est accessible puisque chacun affirme, même petitement, sa puissance d'agir et de penser. Il ne s'agit que de renforcer et développer la vérité que chacun EST.

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Messagepar alcore » 20 mai 2009, 12:20

Je reviens sur cette histoire de signe.

Il est clair que j'ai besoin de signe si je cherche à accéder à une vérité dont je n'ai pas une connaissance directe (je ne dis pas immédiate, car elle peut être directe ET médiatisée).
Ce dont j'ai une connaissance directe est cependant duel: le sentir, l'affection est épreuve de l'union âme_corps. Mon corps (et mon âme) est modifié par d'autres corps; mais ce corps (cette âme) est bien lui aussi quelque chose, et non pas une substance mais une affection. CEtte affection que je suis ne peut venir d'une cause extérieur puisque cette affection première est condition de la seconde.

Cette essence, qualité ou affection que JE SUIS ne peut me venir de l'extérieur donc puisqu'elle me constitue. Je suis en tant que celui ci affection d'autre chose, mais sur le mode d'un rapport interne à cet Autre, la substance. Je suis d'ores et déjà, ici et maintenant, du fait que je persiste, DANS la substance. J'en dérive et pour cette raison même je persiste en elle.

Bien sûr, nous n'avons pas besoin de signe pour savoir que nous sommes ici et maintenant. Je ne vois donc pas de nécessité à exiger un signe pour être certain que je suis ici et maintenant.

Il y a cependant une vérité de ma situation ici et maintenant, une vérité de mon existence singulière. Mon existence est certes tiraillée entre les modifications du corps et de l'âme et son rapport à la substance; je ne prends conscience de mon essence comme mode de la substance que parce que je suis affecté par d'autres corps et âmes.
On peut donc à la fois dire que nous accroissons nos rapports extérieurs avec ce qui est extérieur à notre essence, et dans ce cas nous pâtissons. Mais on peut aussi accroître les rapports qui affirment notre essence, qui font insister notre essence dans la substance. Certains rapports renforcent notre assise dans la substance et donc notre vérité.

La vérité est donc ni de l'essence seule, ni des rapports seuls. Spinoza tient les 2. L'accroissement indéfini des rapports compatibles (expérience comme expérimentation) n'est pas contradictoire avec l'insistance éternelle, ici et maintenant, de notre essence dans la substance. Il n'y a pas de choix )à faire entre une vérité cumulable et une essence éternelle transcendante et inaccessible.

Plus je développe d'affects de composition plus je prends conscience, hors du temps, de mon assise dans l'éternité.

Aucun signe n'est donc nécessaire pour savoir que nous sommes assis dans l'éternité. C'est pr cela que Spinoza dit que nous SENTONS que nous sommes éternels; ce qui veut dire: nous nous sentons dans l'éternité à mesure que nous expérimentons de nouveaux rapports. Rapports indéfinis, mais sensation atemporelle. C'est ici et maintenant que chacun se sauve; il s'agit de sauver l'homme en situation et pas son âme seule !

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Messagepar J » 20 mai 2009, 13:27

Le langage est très problématique. Nous avons des noms pour des choses, comment savoir si les noms que nous employons sont des choses réelles? a force de distinguer les idées des images et des mots, il semble que toute vérité soit absolument muette et que le langage nous ramène toujours à nous -même.
Peut-on dire la vérité que nous sommes? je ne crois pas
L'expérience en ce sens, semble être le seul moyen de connaître la vérité des choses, encore faut-il qu'elle ne soit pas déterminée par nos concepts.

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Messagepar alcore » 20 mai 2009, 14:01

J a écrit :Le langage est très problématique. Nous avons des noms pour des choses, comment savoir si les noms que nous employons sont des choses réelles? a force de distinguer les idées des images et des mots, il semble que toute vérité soit absolument muette et que le langage nous ramène toujours à nous -même.
Peut-on dire la vérité que nous sommes? je ne crois pas
L'expérience en ce sens, semble être le seul moyen de connaître la vérité des choses, encore faut-il qu'elle ne soit pas déterminée par nos concepts.


certes, si vous voulez une vérité des "choses" distincte et séparée de la vérité que vous êtes !

Je vois bien autour de quoi tout cela tourne.
Votre représentation de la vérité est, me semble t il, dogmatique. Vous croyez qu'il y a des "choses" en soi, et vous vous demandez comment avec nos mots on peut y accéder.

Spinoza anéantit à la racine une telle vue dogmatique.
Il n'y a pas de vérité des choses en soi d'abord parce qu'il n'y a pas de choses en soi; toute chose est affection.

Ensuite parce que la vérité des modes est indissociable justmenet de votre vérité à vous, je veux dire de la vérité que vous êtes. Impossible de connaître quoi que ce soit des choses sans développer votre essence !
C'est pr cela que la vérité n'est pas un problème de mot, ni même d'ailleurs de savoir. Le savoir ce n'est pas la vérité, et les mots ce n'est même pas le savoir. La vérité que je suis, cad ma situatio concrète d'être affecté par et d'affection-essence, ne se connaît pas au moyen de signes. Une vérité ne peut être que "sentie".
Selon votre point de vue il y aurait d'un côté les choses auxquelles on n aurait pas accés parce qu'il faut des mots, etc. et de l'autre le moi. C'est cette vue dogmatique que Spinoza récuse. Toute vérité des choses est une vérité de moi meme. Connais toi toi même !

Pourquoi voulez vous dire la vérité que vous êtes ? Quelle conception intellectualiste des choses !
La vérité du bois se révèle au menuisier et il n'a pas besoin de mots pour cela.
Bien entendu, les mots sont utiles et c'est en eux que nous pensons. Cela s'entend puisque la vérité de nous mêmes dépend de l'accroissement des affections affirmatives et que le langage fait partie de l'imagination; il peut donc nous aider lui aussi à accroître nos affections affirmatives.
Un beau poème, une démonstration, etc. tout cela accroît les affects.
Mais en même temps ce qui est fortifié c'est la vérité de chacun: son essence, laquelle n a pas à être dite: elle est d ela substance, dans la substance, éternellement. Cette essence on la "sent" éternelle.

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Messagepar J » 20 mai 2009, 15:03

Merci!
Mais la connaissance adéquate de l'essence des choses supposée possible dans le troisième genre de connaissance n'est-elle pas un accès possible à la chose "en soi"? il faut dire, dit le TIE, que dans la perception par l'intellect, que nous embrassons l'essence adéquate de la chose"!

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Messagepar alcore » 20 mai 2009, 15:22

J a écrit :Merci!
Mais la connaissance adéquate de l'essence des choses supposée possible dans le troisième genre de connaissance n'est-elle pas un accès possible à la chose "en soi"? il faut dire, dit le TIE, que dans la perception par l'intellect, que nous embrassons l'essence adéquate de la chose"!


Tout dépend de ce que l'on appelle chose en soi.
L'en soi est, mais ce n'est pas une chose, et les choses sont seulement des modes, et donc rien en soi.

Ce qui est en soi, c'est la substance, ses attributs.
Les modes sont bien dans l'en soi mais ils ne sont pas "en soi".
En fait toute chose est qualitativement Autre que la substance.
Au point où une chose est, elle est dans la substance, mais comme AUtre de la substance.
Il faut tenir les 2: l'être du fini, c'est la substance; elle est "en soi", mais pas comme une chose, car est le concept de son propre en soi. Si par chose en soi on a en vue quelque chose dont on n'aurait aucun concept alors la substance n'est pas une chose en soi.
Toutefois, la substance ne nous affectepas (Pensées métaphysiques, ch 2); on sait QU'elle est, mais non ce qu'elle est; ce qui nous livre son essence, ce sont les attributs que nous pensons comme distincts seulement en nous de leur substance.

Donc, si vs parlez des choses finies, elles ne sont que pour et dans l'imagination, elles ne sont pas en soi
Si vous parlez de la substance, elle est bien en soi, mais ce n'est pas une "chose"
chose peut désigner aussi bien les "choses" de la perception, que les choses pensées, conçues et qui ne sont plus des choses du tout au sens du réalisme perceptif.

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Messagepar J » 20 mai 2009, 19:17

"chose peut désigner aussi bien les "choses" de la perception, que les choses pensées, conçues et qui ne sont plus des choses du tout au sens du réalisme perceptif."
qu'entendez vous par réalisme perceptif?
substance attributs et modes n'existent-ils pas en vertu de la définition qu'en forme notre esprit?
en effet, la définition affirme l'essence d'une chose,et les déductions qui se font à partir de cette définition, si elles sont concluantes nous amènent à poser l'existence de l'essence d'une telle chose, sans nous donner son existence elle-même bien qu'elle devienne possible, mais si elles se contredisent, pose l'impossibilité d'une telle essence, donc l'impossibilité de l'existence de la chose

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Messagepar Durtal » 20 mai 2009, 19:41

J a écrit :substance attributs et modes n'existent-ils pas en vertu de la définition qu'en forme notre esprit?


?????

Et votre esprit à vous qui forme les définitions en question il existe comment ?

N'êtes vous pas en train de couper la branche sur laquelle vous êtes assis?

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Messagepar alcore » 20 mai 2009, 20:44

J a écrit :qu'entendez vous par réalisme perceptif?
substance attributs et modes n'existent-ils pas en vertu de la définition qu'en forme notre esprit?
en effet, la définition affirme l'essence d'une chose,et les déductions qui se font à partir de cette définition, si elles sont concluantes nous amènent à poser l'existence de l'essence d'une telle chose, sans nous donner son existence elle-même bien qu'elle devienne possible, mais si elles se contredisent, pose l'impossibilité d'une telle essence, donc l'impossibilité de l'existence de la chose


Le réalisme du sens commun consiste dans la conviction que les corps sont des choses en soi, des substances, des êtres. Or ce que nous appelons ainsi "choses" a une genèse: c'est parce que nous sommes affectés lors d'une rencontre que nous considérons tel aspect du flux continu modal comme une "chose" présente.
C'est l'imagination qui, selon ses lois propres, divisent le continu modal en choses distinctes (bien entendu il y a aussi une rutpure qualitative légitime, mais c'est aussi une affection, car la qualité est modale).
C'est ainsi que nous croyons que les choses existent "en soi", qu'elles sont divisibles, etc et tous les paradoxes sur le mouvement dérivent de cette apparence que l'imagination produit. Ce serait une quesiton en soi que d'examiner le statut du mouvement chez SPinoza et comment il répond aux arguments de Zenon.
le monde empirique est donc pour une bonne part produit par l'imagination. Mais attention l'imagination n'est PAS DU TOUT une faculté, que l'on pourrait exercer quand bon nous semble. L'imagination est indissociable de la perception, liée à une présence, et la perception aux affections. Il y a donc une vérité de l'imagination, du monde empirique: en un sens la terre et plate et immobile.

Ensuite, non, les attributs n'existent pas en vertu d'une définition de NOTRE petit esprit ! pas plus d'ailleurs que notre "esprit" ne peut faire que le cercle ait tous ses rayons égaux ! ou que la table que vous voyez est noire ! Essayez donc de percevoir une table noire autrement que noire ! impossible car votre perception est liée selon des lois qui ne dépendent de personne, et qui sont les lois mêmes de la nature divine. De même l'idée de cercle affirme l'égalité des rayons selon de la nature divine.
De même nous affirmons que la substance est en soi en vertu d'une loi de la nature divine. etc.

concernant l'existence. Jamais, au grand jamais, personne n'a soutenu que l'existence puisse se déduire ou conclure de quoi que ce soit ! en tout cas, pas Spinoza.
La définition de la substance, croisée avec l'axiome 1, permet de poser d'emblée, sans déduction que toute substance EST.
Ensuite, il faut une démonstration pour poser que toute substance EXISTE, une fois accordée qu'elle est. L'existence est introduite par approfondissement de l'être de la substance, par élimination de la possibilité d'une production ou création extérieure. Exister, c'est pour la substance, transir son être de toute son essence: tout ce qui en elle est essence "passe" dans son être propre, et c'est cela exister. Spinoza ne déduit pas l'existence.


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