Traité théologico-politique/Chapitre XVIII

De Spinoza et Nous.
Version du 24 décembre 2013 à 11:26 par Henrique (discuter | contributions)
(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à : Navigation, rechercher



Baruch Spinoza

Chapitre XVIII


Quelques principes politiques
déduits de l'examen de la République des Hébreux

et de leur histoire.



Tractatus theologico-politicus

PraefatioCaput IIIIIIIVV
VIVIIVIIIIXX
XIXIIXIIIXIVXV
XVIXVIIXVIIIXIXXX

Autres œuvres

Quoique la constitution hébraïque, telle que nous l’avons conçue dans le précédent chapitre, pût subsister éternellement, il n’est plus possible aujourd’hui de l’imiter, et ce serait une entreprise très-déraisonnable. Car celui qui voudrait transférer ses droits à Dieu devrait former, à la manière de la nation hébraïque, une alliance expresse avec Dieu ; ce qui exigerait non-seulement la volonté de celui qui abandonnerait ses droits, mais encore celle de Dieu. Or Dieu n’a-t-il pas déclaré par les apôtres que désormais l’alliance de la Divinité avec l’homme ne serait écrite ni avec de l’encre, ni sur des tables de pierre, mais dans le cœur de chacun par l’Esprit divin ? Ensuite cette forme de gouvernement ne saurait être de quelque utilité qu’à un peuple qui voudrait se concentrer en lui-même, sans relations au dehors, s’enfermer dans ses frontières et se séparer du reste du monde, et non point à un peuple qui a besoin d’avoir des relations continuelles avec ses voisins. Voilà pourquoi une pareille forme de gouvernement ne pourrait convenir qu’à un très-petit nombre de peuples. Toutefois, bien que la constitution hébraïque ne soit pas à imiter en bien des points, il en est beaucoup cependant qui méritent d’être remarqués et qu’on pourrait même lui emprunter très-utilement. Mais comme mon dessein, ainsi que j’en ai déjà averti, n’est pas de composer un traité complet de politique, je ne parlerai que de celles des institutions des Hébreux qui se rattachent à mon objet.


Je remarquerai premièrement que la royauté de Dieu dans l’État ne s’opposait point à ce qu’on revêtît un homme de la souveraine majesté, et qu’on remît entre ses mains le souverain pouvoir. En effet, les Hébreux, après avoir transféré leurs droits à Dieu, ne donnèrent-ils pas le souverain pouvoir à Moïse, qui seul possédait le droit d’établir et d’abolir les lois au nom de Dieu, de choisir les ministres du culte, de juger, d’instruire, de châtier le peuple, enfin de commander à tous d’une manière absolue ? Ensuite, bien que les ministres du culte fussent les interprètes de la loi, il ne leur appartenait point de juger les citoyens et d’en exclure aucun de la communauté politique ; c’était le droit exclusif des juges et des chefs choisis au sein du peuple (voyez Josué, chap. VI, vers. 26 ; Juges, chap. XXI, vers. 18 et 1 ; et Shamuel, chap. XIV, vers. 24). Si nous venons maintenant à considérer attentivement l’histoire des Hébreux et leurs vicissitudes, nous rencontrerons beaucoup d’autres institutions politiques dignes d’être remarquées : en voici quelques-unes.


I. On ne vit aucune secte particulière au sein de la religion que dans le second empire, lorsque les pontifes prirent possession du droit de porter des décrets et de diriger les affaires de l’État, et que, pour conserver éternellement ce droit, ils usurpèrent le pouvoir exécutif et voulurent être appelés du nom de rois. Ce fait s’explique de lui-même. Dans le premier empire, aucun décret ne pouvait recevoir son nom des pontifes, ceux-ci n’ayant pas le droit de porter des décrets, mais simplement de transmettre les réponses de Dieu aux questions soit des chefs, soit des assemblées. Ils ne devaient par conséquent avoir aucun désir de susciter de nouveaux décrets ; ils durent plutôt défendre et maintenir les usages reçus et consacrés par la tradition. Quel autre moyen avaient-ils de conserver intacte leur indépendance contre le mauvais vouloir des chefs que de veiller à ce que les lois ne fussent point corrompues ? Mais quand ils eurent joint au pontificat le pouvoir d’administrer l’État, chacun d’eux, dans les choses qui concernent la religion comme dans tout le reste, se mit en devoir de rendre son nom glorieux en réglant toutes choses par l’autorité pontificale et en faisant chaque jour sur les cérémonies, sur la foi, sur toutes choses, de nouveaux décrets dont ils voulurent égaler la sainteté et l’autorité à celles des lois de Moïse. De là la religion inclinant de plus en plus à de misérables superstitions, de là le vrai sens et la vraie interprétation des lois de plus en plus corrompus. Ajoutez à cela que dans le principe, lorsque les pontifes se frayaient la voie au souverain pouvoir, ils consentaient à tout dans le but de gagner le peuple, donnant leur approbation à toutes les actions de la multitude, même les plus impies, et accommodant les saintes Écritures à la corruption des mœurs les plus dissolues. J’invoquerai sur ce point le témoignage de Malachie ; il réprimande avec énergie les prêtres de son temps, les appelle les contempteurs du nom de Dieu, et les poursuit de ces reproches sévères : " Les livres du pontife sont le sanctuaire de la science, et c’est de sa bouche qu’on vient apprendre la loi, parce qu’il est l’envoyé de Dieu ; mais vous, vous vous êtes écartés de la droite voie, et vous avez fait de la loi un sujet de scandale pour plusieurs : Vous avez corrompu le pacte fait avec Lévi, dit le Dieu des armées. " Et, continuant de la sorte, il les accuse d’interpréter la loi selon leur bon plaisir, et dans l’oubli de Dieu, de ne songer qu’à leur intérêt. Or il est certain que les pontifes ne purent commettre ces infidélités si adroitement qu’elles échappassent aux regards des sages, surtout lorsque, dans l’excès de leur audace, ils en vinrent à prétendre qu’il n’y avait de rigoureusement observables que les lois écrites, et que, quant aux décrets que les pharisiens (les pharisiens, comme l’atteste Josèphe dans ses Antiquités, se recrutaient dans les derniers rangs du peuple) appelaient la tradition de leurs pères, rien ne commandait de la respecter. Quoi qu’il en soit, on ne saurait douter que l’esprit de flatterie des pontifes envers le peuple, la corruption de la religion et des lois, et l’incroyable accroissement de ces dernières, n’aient été fréquemment l’occasion de querelles et de dissensions que rien ne put apaiser. Quand des hommes égarés par la superstition se divisent et luttent entre eux, soutenus les uns et les autres par l’autorité publique, vous essayeriez en vain de les réunir et de rétablir entre eux la concorde ; c’est une nécessité qu’ils se détachent les uns des autres et forment des sectes diverses.


II. Il est digne de remarque que les prophètes, qui n’étaient rien dans l’État, par le pouvoir qu’ils avaient de distribuer les avertissements et les reproches irritaient plutôt le peuple qu’ils ne le corrigeaient, et qu’au contraire les rois, qui avaient le pouvoir de châtier, se faisaient obéir docilement. Mais les rois pieux ne purent souvent supporter les prophètes, à cause du droit dont ceux-ci étaient revêtus de prononcer sur la justice et l’injustice de toutes choses, et de châtier même les rois pour les actions publiques ou particulières exécutées contre leur sentiment. Le roi Asa, qui, d’après le témoignage de l’Écriture, fut un roi pieux, fit jeter le prophète Hananias sous la roue d’un moulin (voyez Paralipomènes, liv. II, chap. XII), pour avoir osé lui reprocher ouvertement d’avoir conclu un traité avec le roi d’Arménie. Beaucoup d’autres exemples qu’il serait facile de citer montreraient que la religion reçut plus de dommage que de profit de cette liberté de parole des prophètes, et je pourrais ajouter que l’excès de leurs droits fut l’origine d’un grand nombre de guerres civiles.


III. Il est encore remarquable que pendant tout le temps que le peuple eut le pouvoir entre les mains, il n’y eut qu’une seule guerre civile, et encore cessa-t-elle sans laisser aucune trace, les vainqueurs ayant pris compassion des vaincus, à tel point qu’ils s’efforcèrent de toutes les manières de leur rendre à la fois l’honneur et le pouvoir. Mais lorsque le peuple, qui n’était point habitué aux rois, eut changé la première forme de gouvernement en la forme monarchique, il n’y eut plus de terme aux guerres civiles, et telle fut l’atrocité des combats qu’il n’y a rien de pareil dans les annales de l’histoire. En un seul combat (peut-on le croire ?) cinquante mille Israélites furent massacrés par ceux de Juda. Dans un autre combat, les Israélites, à leur tour, font un grand massacre de ceux de Juda (l’Écriture ne donne point le nombre des morts), s’emparent de la personne du roi, jettent presque par terre les murs de Jérusalem, et sans respect pour le temple lui-même (ce qui montre que leur colère n’eut ni frein ni limites), ils le pillent et le dépouillent ; puis, chargés du butin pris sur leurs frères, rassasiés de sang, traînant à leur suite des otages, et laissant le roi dans un royaume dévasté, ils mettent enfin bas les armes, fondant leur sécurité moins sur la bonne foi de ceux de Juda que sur leur faiblesse. Ceux-ci, en effet, quelques années après, ayant refait leurs forces, engagent un nouveau combat, dans lequel la victoire reste encore aux Israélites, qui égorgent cent vingt mille enfants de Juda, emmènent en captivité femmes et enfants au nombre de deux cent mille, emportent encore un riche butin ; puis enfin, épuisés par ces combats et par beaucoup d’autres racontés au long dans leur histoire, ils deviennent la proie de leurs ennemis. Mais si nous voulons reporter notre pensée à ces temps où les Hébreux ont joui d’une paix pleine et entière, quel contraste ! Souvent, avant les rois, quarante années se sont écoulées, et même une fois (ce qui semble incroyable) quatre-vingts années, sans guerre ni à l’extérieur ni à l’intérieur, dans une tranquillité parfaite. Au contraire, les rois, maîtres du gouvernement, ne combattant plus pour obtenir la paix et la liberté, mais pour acquérir de la gloire, entreprirent tous, à l’exception de Salomon (dont le génie et la sagesse devaient mieux éclater pendant la paix), des guerres sans cesse renaissantes, comme on peut le lire dans l’histoire des Juifs. Ajoutez à cela cette funeste passion de régner, qui ensanglanta plus d’une fois les marches du trône. Enfin les lois, tant que dura le gouvernement du peuple, furent défendues contre la corruption et constamment observées. C’est qu’avant les rois, il y eut peu de prophètes qui vinssent apporter des avertissements au peuple, et qu’après leur élection, il y en eut un grand nombre. Hobadias ne sauva-t-il pas cent prophètes de mort violente, et ne les cacha-t-il pas, de peur qu’ils ne fussent enveloppés avec les autres dans le même massacre ? Nous ne voyons pas non plus que le peuple ait été trompé par de faux prophètes, si ce n’est après qu’il eut remis le pouvoir dans les mains des rois, auxquels les prophètes s’efforçaient de complaire. Il faut remarquer encore que le peuple, dont l’esprit souple s’élève ou s’abaisse selon les circonstances, se corrigeait facilement dans l’adversité, revenait à Dieu, rétablissait les lois, et de cette manière échappait au danger, au lieu que les rois, dont l’esprit est sans cesse enflé d’orgueil et qui ne sauraient fléchir sans honte, restèrent obstinément attachés à leurs vices jusqu’à la ruine entière de Jérusalem.


Ces considérations montrent clairement :


I. Qu’il n’y a rien de plus funeste à la fois à la religion et à l’État que de confier aux ministres du culte le droit de porter des décrets ou d’administrer les affaires publiques ; qu’au contraire, toutes choses demeurent bien établies, lorsqu’ils se renferment dans les limites de leurs attributions et qu’ils se bornent à répondre aux questions qui leur sont adressées, et, en tout cas, restreignent leurs enseignements et leurs actes administratifs aux choses reçues et consacrées par un long usage.


II. Que rien n’est si périlleux que de rapporter et de soumettre au droit divin des choses de pure spéculation, et d’imposer des lois aux opinions qui sont ou peuvent être un sujet de discussion parmi les hommes. Le gouvernement en effet ne peut être que violent là où les opinions, qui sont la propriété de chacun et dont personne ne saurait se départir sont imputées à crime ; il y a plus, dans un tel pays, le gouvernement est ordinairement le jouet des fureurs du peuple. Ainsi Pilate, cédant à la colère des pharisiens, fit crucifier le Christ qu’il croyait innocent. Ensuite les pharisiens, pour dépouiller les riches de leurs dignités, se mirent à agiter les questions religieuses et à accuser d’impiété les saducéens ; et, à l’exemple des pharisiens, les plus détestables hypocrites, agités de la même rage, qu’ils décoraient du nom de zèle pour les droits de Dieu, s’acharnèrent à persécuter des hommes recommandables par leurs vertus et odieux par cela même au peuple, décriant publiquement leurs opinions et allumant contre eux la colère d’une multitude effrénée. Or comme cette licence religieuse se déguise sous le masque de la religion, elle échappe à tout moyen de répression là surtout où le souverain a introduit quelque secte dont il n’est pas lui-même le chef. Car alors les hommes qui dirigent l’État ne sont plus considérés comme les interprètes du droit divin, mais comme de simples sectaires qui reconnaissent dans les docteurs de la secte les légitimes interprètes de ce droit. Et voilà pourquoi, aux yeux du peuple, l’autorité des magistrats touchant les croyances religieuses est de nulle valeur ; celle des docteurs, au contraire, est toute-puissante, au point que les rois mêmes doivent, selon lui, se soumettre docilement à leurs interprétations. Pour mettre les États à l’abri de tous ces maux, on ne saurait imaginer rien de mieux que de faire consister la piété et le culte tout entier dans les œuvres, à savoir, dans l’exercice de la charité et de la justice, et de laisser libre le jugement de chacun sur tout le reste. Mais nous reviendrons abondamment sur ce sujet.


III. On voit encore combien il importe pour l’État et pour la religion de confier au souverain le droit de décider de la justice et de l’injustice. Car si ce droit de juger la valeur morale des actions n’a pu être confié aux divins prophètes qu’au grand dommage de l’État et de la religion, combien moins devra-t-il l’être à des hommes qui n’ont ni la science qui prévoit l’avenir, ni la puissance qui opère les miracles ! Mais c’est encore un sujet que je me réserve de traiter spécialement.


IV. On voit enfin combien il est funeste à un peuple qui n’a point l’habitude de l’autorité royale et qui est déjà en possession d’une constitution, de se donner un gouvernement monarchique. Car ni le peuple ne pourra supporter un gouvernement si absolu, ni le roi respecter ces lois et ces droits du peuple institués par un pouvoir moins puissant. Encore bien moins se résoudra-t-il à défendre une législation dans l’institution de laquelle on n’a pu avoir égard au roi, mais seulement au peuple, ou au conseil qui administrait les affaires publiques, à tel point qu’en prenant la défense des anciens droits du peuple, il s’en ferait l’esclave au lieu d’en être le maître. Le nouveau monarque fera donc tous ses efforts pour instituer de nouvelles lois, réformer la constitution à son profit, et rendre moins facile au peuple d’enlever aux rois l’autorité souveraine que de la leur abandonner. Je ne puis m’empêcher d’ajouter qu’il ne serait pas moins dangereux de mettre à mort le roi, fût-il mille fois constaté qu’il est un tyran. Car le peuple, habitué à l’autorité royale, dompté par elle, prendra en mépris et en dérision une autorité inférieure, et un roi tué, il se verra bientôt contraint, comme autrefois les prophètes, de lui élire un successeur, qui sera tyran, non plus volontairement, mais par nécessité. De quel œil pourra-t-il voir autour de lui des citoyens, les mains souillées d’un sang royal, faire gloire de leur parricide comme d’une belle action ? Ajoutez que le crime n’a été commis que pour lui être un exemple et un avertissement à lui-même. Sans aucun doute, s’il veut être véritablement roi, ne point reconnaître le peuple pour le juge des rois et pour son maître, et ne point se contenter d’un règne précaire, il doit d’abord venger la mort de son prédécesseur, et avoir ainsi par devers lui un exemple qui ôte au peuple l’audace de commettre une seconde fois le même forfait. Or il ne pourra guère venger la mort du tyran par le supplice des citoyens sans défendre la cause du tyran, approuver ses actions, et par conséquent marcher sur ses traces. De là vient que le peuple peut bien changer souvent de tyran, mais non pas s’affranchir de la tyrannie, non plus que substituer à la monarchie une autre forme de gouvernement. Il y a de cela un funeste exemple chez le peuple anglais, qui s’est efforcé de donner au meurtre d’un roi les apparences de la justice. Le roi mort, il fallut bien tout au moins changer la forme du gouvernement ; mais après que des flots de sang eurent été répandus, on n’eut rien de mieux à faire que de saluer sous un autre nom un nouveau monarque (comme s’il n’eût été question que d’un nom !), qui ne pouvait se maintenir sur le trône qu’en détruisant, jusque dans ses derniers rejetons, la race royale, qu’en massacrant les citoyens amis ou suspects d’être amis du roi, qu’en faisant la guerre pour éviter l’esprit d’opposition que fait naître la paix, afin que le peuple, occupé d’événements nouveaux, oubliât les sanglantes exécutions qui avaient détruit la famille royale. Aussi la nation s’aperçut-elle, mais trop tard, qu’elle n’avait rien fait autre chose pour le salut de la patrie que de violer les droits d’un roi légitime et changer l’état des choses en un état pire. Elle résolut donc de revenir en arrière, et n’eut de repos que lorsque toutes choses eurent été rétablies dans leur état primitif. Mais quelqu’un prétendra peut-être, en objectant l’exemple du peuple romain, que le peuple peut aisément s’affranchir de la tyrannie : je ne vois là, au contraire, qu’une nouvelle confirmation de mon opinion. En effet, bien que le peuple romain ait pu, plus facilement qu’un autre, se débarrasser d’un tyran et changer la forme du gouvernement, parce qu’à lui seul appartenait le droit d’élire le roi et son successeur, et aussi parce qu’étant formé d’hommes enclins à la sédition et adonnés au crime, il n’avait jamais pris l’habitude d’obéir aux rois (sur six n’en avait-il pas égorgé trois ?) ; néanmoins tous ces efforts n’aboutirent jamais qu’à remplacer un tyran unique par plusieurs autres, qui l’occupèrent misérablement à des guerres extérieures et intérieures sans cesse renaissantes, jusqu’à ce qu’enfin l’État tomba de nouveau aux mains d’un monarque, avec un changement de nom pour toute modification, comme en Angleterre. En ce qui concerne les États confédérés de la Hollande, ils n’eurent jamais de rois, que nous sachions, mais des comtes, auxquels ne fut jamais confié le droit souverain. En effet, à voir la toute-puissance des États confédérés de la Hollande du temps du comte de Leicester, il est permis d’induire qu’ils se réservèrent toujours, avec le droit de rappeler aux comtes leur devoir, le pouvoir de défendre ce droit ainsi que la liberté des citoyens, et si les comtes dégénéraient en tyrans, d’en tirer vengeance, enfin de modérer si bien leur puissance qu’ils ne pussent rien faire qu’avec la permission et l’approbation des États confédérés. D’où il résulte que ce fut toujours aux États qu’appartint le pouvoir et la majesté suprême, que le dernier comte s’efforça d’usurper ; et tant s’en faut qu’ils aient abandonné l’autorité souveraine qu’ils ont relevé l’empire sur le penchant de sa ruine. Ces exemples confirment donc ce que nous avons avancé, qu’il faut toujours conserver la forme de gouvernement existante, et qu’on ne saurait la changer sans courir le danger d’une ruine complète. Telles sont les remarques que j’ai cru à propos de faire à l’occasion des institutions hébraïques.



Chapitre XVII Traité théologico-politique Chapitre XIX
Outils personnels
Espaces de noms
Variantes
Actions
Découvrir
Œuvres
Échanger
Ressources
Boîte à outils