Korto a écrit :Vu le peu de cas fait par Spinoza des femmes dans son Traité Politique où la sainte Expérience lui a révélé leur évidente infériorité,
Vu l'indifférenciation du statut de la personne humaine dans l'univers spinosien,
et pourtant ... Ethique 4 Prop 58 scolie:
"Ensuite, que, l'homme ayant trouvé la femme, laquelle convenait tout à fait avec sa nature, il connut qu'il ne pouvait y avoir dans la nature RIEN QUI PÛT LUI ÊTRE PLUS UTILE QU'ELLE"
ce n'est pas vraiment ce qu'on pourrait appeler 'indifférence' par rapport à la femme, et encore moins une 'évidente infériorité' ...
En effet, dans le Traité Politique il exclut les femmes de la politique. Seulement, il n'exclut pas UNIQUEMENT les femmes et pour le fait qu'ils soient des femmes. Il exclut toute personne qui, de fait, dans la société du XVIIe telle qu'elle était, se trouve dans un lien de dépendance par rapport à quelqu'un. Ce qui était le cas pour un tas de gens: enfants, serviteurs, femmes. Je ne vois vraiment pas ce qui indiquerait une idée d'infériorité par rapport aux femmes là-dedans. Il se fait que pendant des siècles, en Occident, les hommes ont dominé les femmes. Si donc Spinoza ne veut pas verser dans un quelconque utopisme (tel qu'il le dit explicitement), mais seulement se baser sur l'état des choses tel qu'il est, sa conclusion me semble être tout à fait logique.
L'erreur est d'en faire non plus une éthique (un ensemble de règles qui décrivent les lois qui règnent les rapports humains) mais une morale (un ensemble de règles prescriptives). Jamais Spinoza ne dit qu'il faut traiter les femmes comme étant 'essentiellement' inférieures. Il constate simplement qu'aussi longtemps qu'on ne les éduque pas, et qu'aussi longtemps qu'on les oblige de dépendre des hommes, eh bien, inutiles de les demander d'aller voter, puisqu'elles ne pourront faire que ce que celui qui décide à leur place leur imposent de faire.
Vu l'indéfinition de l'essence humaine (démerdez-vous pour savoir ce que c'est que de de persévérer dans son humanité),
ben ... expliciter ce qui, dans la logique spinoziste, signifie persévérer dans son être (jamais Spinoza ne dit 'dans son humanité', là tu modifies le texte .. l'humanité n'existe pas pour Spinoza, c'est une abstraction, un universel, donc un produit de l'esprit humain) ... c'est pas seulement 'se démerder ... c'est précisément le boulot d'un lecteur qui veut lire de façon philosophique un texte philosophique (tes remarques par rapport à mon message précédent, à ce sujet, étaient intéressantes, j'y reviens bientôt).
Vu l'inexistence absolue de Valeurs dans le meilleur des mondes de notre philosophe,
pourtant, il parle sans cesse du bon et du mauvais ... où vois-tu une absence absolue de valeurs ... ?
Vu sa délicate définition de l'Amour qui n'est rien d'autre qu'une "joie accompagnée de l'idée d'une cause extérieure" obligeant à "avoir et conserver présente la chose aimée",
Vu la tradition putassière des Pays bas,
euh ... qu'est-ce qui te fait penser que cette 'tradition' y serait différente qu'ailleurs .. ??
il n'est pas exclu que Baruch soit un peu "allé aux putes", pour reprendre l'élégante formule d'Augustin. Dans les vitrines d'Amsterdam ?
aller 'un peu' aux putes ... tu pourrais m'expliquer comment faire cela?
Et comment aller aux putes, un peu ou beaucoup, n'importe, si on est convaincu que "l'amour sexuel, c'est-à-dire l'appétit d'engendrer qui naît de la forme, et, absolument parlant, tout Amour qui reconnaît une autre cause que la liberté de l'âme, se change facilement en Haine." (E4Ch.19).
remarque que l'acte sexuel n'est pas du tout appelé 'Amor' (telle que tu reprends la définition ci-dessus) par Spinoza, mais 'libido'. Tandis que juste après, il spécifique ce qu'il entend par la véritable Amour entre homme et femme: celle qui "n'a pas pour seule cause la forme, mais surtout la liberté de l'âme"
Un homme et une femme qui en toute liberté d'âme (chose qui Spinoza valorise le plus, s'il faut encore le rappeler) décident d'avoir des enfants et de les éduquer ensemble, tout en y ajoutant une libido causée simplement par la beauté .. tu appelles tout ça 'faire peu de cas de la femme' ... ?
Il n'est pas exclu non plus que la prostitution, crime contre l'humanité aussi grave que l'holocauste et l'esclavage, soit considérée par les spinozistes comme une manière comme une autre de persévérer dans son être de maquereau, de client ou fille vénale.
Pourquoi s'gêner ? Hein !
Bien sûr qu'un maquereau ne fait rien d'autre que de persévérer dans son être quand il vend les femmes-esclaves qu'il possède. Mais si tu en déduis qu'un philosophe, qui en théorie a trouvé quelques Joies un tout petit peu plus intenses et durables que cela, persévérerait dans son être en se ravalant au rang d'un client de putes, tu fais de nouveau de ce qui n'est qu'une éthique une morale: tu supposes que si Spinoza décrit les faits, en même temps il y ajoute, tel le Dieu de la Bible: "et Spinoza vit que cela était bon". Or relis la définition que Spinoza donne de ce qui est bon: tu verras pourquoi il n'a pas écrit une morale.
Cordialement,
Louisa