cours de gilles deleuze sur spinoza

Actualités et informations diverses sur Spinoza, la philosophie en général ou regards spinozistes sur l'actualité.
Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar hokousai » 06 juin 2015, 01:28

à aldo

Je trouve ce texte autant polémique que métaphysique.. mais bref l'ambiguité de "différence et répétition" est assez bien exprimée.( la philosophie de Deleuze est une philosophie du polemos =le combat )

Chez Deleuze je ne comprends pas çà (et principalement ça)
Intensité : -« Le concept d’intensité (…) exprime la différence pure comme texture première de
l’Etre. « L’expression ‘‘différence d’intensité’’ est une tautologie. Toute intensité est
différentielle, différence en elle-même. »(Différence et répétition, 1968, p. 287) »


Deleuze ne se voulait surtout pas hégelien et il pose néanmoins, comme Hegel, la négation pure comme fondement. Le moteur c'est la différence pas la ressemblance.
Le moteur ce n'est pas l'union ou la tension vers l' union,
mais la désunion et la tension vers la désunion.

On ne peut expliquer les étants par ce moteur là.
On expliquera peut être la vacuité ultime d'identité à soi des étants ...mais dans ce cas c' est aussi la différence qui est emportée.

Moi je ne vois pas dans l'intensité l'affirmation de la différence, mais l'affirmation de ce qui doit ressembler à quelque chose.
L'intensité( singulière ) agit et se moque de la différence, l'intensité est positive. Toutes les autres intensités lui ressemblent.
Il n'y a intensité que parce qu'il y a tension vers la constitution de quelque chose ( des étants )

Cela dit si les intensités sont graduées en puissance, certes, elles ne sont pas combattantes.
Il n'y a pas un degré d' intensité qui n'ait besoin d'un autres et d'une infinité d'autres.
Elles s' épaulent, s'appuient les unes sur les autres, elles entraident (nolens volens)
Elles ne sont qu'une seule intensité infinie et indivisible .

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar hokousai » 07 juin 2015, 00:40

je vais laisser un peu l'intensité ( quitte à y revenir plus tard.

je ne sais, Aldo, ce que dis Deleuze de la mort.
Je connais la position de Spinoza ( assez ambigue néanmoins )


je connais aussi la critique de Hans Jonas à propos de Spinoza
Malheureusement, Spinoza fait de la mort un événement extérieur à la vie humaine: elle consiste dans l’affaiblissement du corps, dépassé par les causes extérieures, et partant dans l’affaiblissement de l’âme.
Au lieu donc de penser une vie dynamisée par un rapport intérieur à la mort, il pense:
-soit une vie qui s’arrête avec la mort– le corps meurt donc comme une machine s’arrête ; il n’y a plus de différence entre la vie et la matière, et l’âme, qui dépend de la vie corporelle, se réduit à la matière –
-soit une vie qui commence vraiment avec elle, et c’est la vie éternelle de l’entendement composée d’idées adéquates.
«L’ontologie de la mort» le conduirait donc à renouer avec un dualisme implicite qu’il avait pourtant prétendu dépasser.


critique que je partage et qui se trouve expliquée ICI
http://www.academia.edu/1192692/La_ph%C3%A9nom%C3%A9nologie_de_la_vie_de_Hans_Jonas_en_d%C3%A9batavec_la_conception_spinoziste_de_lorganisme

aldo
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 485
Enregistré le : 13 janv. 2015, 11:33

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar aldo » 07 juin 2015, 03:00

Voilà ce que je comprends des intensités.

Pour Deleuze, nous sommes à la fois multiples et univoques. Multiples soit un composé de singularités qu'on ne peut jamais rassembler en même temps : l'une succède à l'autre, au fil des événements, des émotions, des pensées etc. Je pense que Deleuze envisage que nous percevons nos singularités sous forme d'intensités (c'est ainsi que je l'interprète, le comprends et l'approuve).

Les intensités ne sont rien d'autre qu'un différentiel ; un différentiel qui marque d'abord des passages : passages de l'une à l'autre de nos émotions, de nos pensées ; c'est-à-dire qu'elles sont d'abord une mesure : il est question de plus ou de moins d'intensité (sans référence particulière à une intensité "positive"de référence).
Elles renvoient donc à des intuitions, des émotions, des pensées etc, et comme telles reviennent ou persistent (tout en évoluant au cours d'une vie). Elles s'impriment ainsi dans la mémoire en même temps que nous les faisons nôtres. Et ce sont elles qu'on reconnaît, auxquelles on s'identifie.

L'être est donc intensités en ce sens que c'est aux intensités qu'il se réfère (ou devrait le faire) pour se repérer, se reconnaître : c'est à travers le mouvement des intensités d'être qu'on devient (bien plus en tous cas que selon des repères/savoirs de la représentation qu'on ferait sien). Il n'y a pas un sujet qu'on pourrait rassembler à un moment m et qui contiendrait la totalité de quoi que ce soit de ces intensités (expériences, souvenirs, pensées etc). Seule l'univocité rassemble mais on ne la convoque pas. La somme des intensités est toujours plus que n'importe quelle conscience du sujet : le sujet est dans ce sens une réduction...

C'est pour ça qu'une philosophie qui ne fait pas confiance en le représentation pour expliquer le monde ne peut que partir de l'empirisme. En ce qui me concerne, je n'accorderais pas le moindre crédit à un moine n'ayant jamais connu de femme pour m'expliquer ce que doit être la nature d'une relation entre un homme et une femme. Non pas qu'il ne puisse rien en dire ; il parlera peut-être avec beaucoup de sagesse de l'un et de l'autre, évoquera peut-être des trucs bien sentis sur les illusions autour de l'amour en général, mais aucune intensité en lui ne sera jamais en mesure de le faire se confronter à quelque chose de l'ordre de la réalité d'une relation amoureuse... et donc de son intensité.
Il parlera toujours un peu "d'autre chose".


PS : je n'ai pas souvenir que Deleuze parle de la mort.
Sur ce que je lis dans ton extrait, j'ai une espèce de réticence à envisager une vie "dynamisée par un rapport intérieur à la mort"... disons que ça me paraît très intello, comme façon de penser. Peut-être à ce moment faut-il dire les réticences de Deleuze à "faire le point", et que ça répondra un peu...
(ton lien m'ouvre une page sans texte, où faut-il cliquer ?)
Modifié en dernier par aldo le 07 juin 2015, 12:17, modifié 1 fois.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar hokousai » 07 juin 2015, 12:09

à Aldo

disons que ça me paraît très intello, comme façon de penser.


Un rapport au vieillissement, si tu veux moins intello ...( ce n'est pas exactement la mort, mais c'est aussi une question largement aussi intéressante ).

Ce que je trouve assez tragique chez mes contemporains c" est : "vivre très longtemps" ( voir éternellement ) au vu de progrès escomptés de la science ...
Mais ajouter des jours aux jours à partir de quel âge ?
Est-ce que je vais devoir vivre 2OO ans dans l'état ou je serai quand j 'aurai 10O ans ?

C' est très pragmatique comme problème,
pas intello du tout.

Chez Deleuze ( que je ne connais à vrai dire pas suffisamment ) la question du vieillissement ( ou de la mort ), comment est- elle traitée ?
Il faudrait rechercher un peu plus.

Il n'est pas négligeable du tout de se souvenir que Deleuze n'était pas vraiment en bonne santé ( et toute sa vie durant )...
Comme si finalement ce qui va surprendre un homme en bonne santé , c'est à dire son le vieillissement ) avait toujours été intégré chez lui.( ce qui est de toujours intégré ne pose pas les mêmes questions )

Je dis "surprendre" parce que même si on le sait ( qu'on va décliner ) on ne le sait pas réellement avant.

aldo
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 485
Enregistré le : 13 janv. 2015, 11:33

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar aldo » 07 juin 2015, 12:43

Non décidément, je ne vois pas ces thèmes traités chez Deleuze. En ce qui me concerne (et à chaud) :

hokousai a écrit :Ce que je trouve assez tragique chez mes contemporains c" est : "vivre très longtemps"

Persévérer dans l'être ?
Il se trouve que, quel que soit l'âge, on est toujours dans le même problème, face à l'idée de mourir.
(mon père par exemple est dans une maison de retraite et semble ne pas avoir du tout envie de mourir, malgré des avc qui l'ont diminué, cet dont il est tout à fait conscient. Je le soupçonne presque d'être ravi d'avoir dépassé ses peurs de la mort, qui se traduisaient par des obsessions de choper un cancer etc)

hokousai a écrit :Il n'est pas négligeable du tout de se souvenir que Deleuze n'était pas vraiment en bonne santé ( et toute sa vie durant )...
Comme si finalement ce qui va surprendre un homme en bonne santé , c'est à dire son le vieillissement ) avait toujours été intégré chez lui.( ce qui est de toujours intégré ne pose pas les mêmes questions )

Je dis "surprendre" parce que même si on le sait ( qu'on va décliner ) on ne le sait pas réellement avant.

Là je voudrais juste introduire une idée...
Je trouve que c'est comme si certains avait quelque chose de déjà "vieux", et ce relativement jeune... comme s'il ne "rejoignaient" leur âge qu'à un âge avancé, sans avoir trop su comment vivre la jeunesse (sa supposée insouciance etc) ; quand d'autres semblent au contraire conditionnés pour "être jeunes" et ne savent pas trop comment se sortir de là quand l'âge vient.
(j'ignore si l'on peut rebondir sur ce genre de propos)

Ta remarque sur la santé me semble (et même plus que ça) tout à fait juste.
Ceci dit, le vieillissement par dessus la mauvaise santé ne peut qu'être une très sale histoire qui surprend quand même.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar hokousai » 08 juin 2015, 01:33

à Aldo

Deleuze en parle dans ce cours ( et référence tacite à Spinoza même s'il n'est pas cité )

Deleuze a écrit :
Or, si on me flanque de la mort, dans l’idée de processus - encore une fois, le processus, il poursuit son accomplissement - La mort, elle est toujours interruption du processus.
  La mort ne peut pas faire partie du processus, il n’y a pas de processus de la mort. Voilà, je le dis avec passion, non pas du tout pour dire : "j’ai raison", pour dire, ça me paraît contradictoire la mort et le processus.......

(plus bas )
 Et bien ça veut dire être prêt à admirer, à signer si je le pouvais, la phrase : "la mort vient toujours du dehors". La mort vient toujours du dehors. La mort vient toujours de dehors, c’est-à-dire la mort n’est pas un processus. Et quelque que soit la beauté des pages, qui d’une manière ou d’une autre, peuvent se ramener à un champ de mort ou à une exaltation de la mort - je ne peux dire qu’une chose, c’est que pour ma part, j’en dénie la beauté. C’est-à-dire je dis, quelqu’en soit la beauté, parce que pour moi, c’est des offenses à quoi ? C’est des offenses à la pensée, c’est des offenses à la vie, ça va de soi, mais c’est des offenses à la pensée, c’est des offenses à tout vécu.
  Et le culte de la mort, moi ça me paraît vraiment la chose.... sous quelque forme qu’elle soit. Alors elle a son aspect psychanalytique de la mort, il a son aspect fasciste, il a son aspect psychotique, tout ça. Je peux pas vous dire, je dis pas que ça n’existe pas, je dis même pas que je l’ai pas en moi comme tout le monde.
  Je dis c’est ça l’ennemi.



http://www2.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=70

C' est ambigüe ça. Il marche sur deux registres:

1) métaphysique ( et Spinoziste pour le coup ): La mort vient toujours de dehors, c’est-à-dire la mort n’est pas un processus.
2) esthétique (ou affectif /émotionnel): c’est que pour ma part, j’en dénie la beauté.

Je dis c’est ça l’ennemi
Affirmation très forte.
Mais la vie sans la mort ?

Moi je veux bien qu'il n' y ait à la limite pas de mort ( même pas causée par des causes extérieures ) ...mais des processus de "transformations" .
Mais ça y ressemble un peu quand même. :wink:

aldo
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 485
Enregistré le : 13 janv. 2015, 11:33

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar aldo » 08 juin 2015, 14:48

hokousai a écrit :Mais la vie sans la mort ?

Moi je veux bien qu'il n' y ait à la limite pas de mort ( même pas causée par des causes extérieures ) ...mais des processus de "transformations" .
Mais ça y ressemble un peu quand même. :wink:

Il n'est pas question de "la vie sans la mort", mais la philosophie de Deleuze n'est en rien une sagesse, un mode d'emploi de comment vivre, ou un savoir. Et ce n'est pas à partir de la mort qu'il envisage, à la manière de Heidegger par exemple (si j'ai bien compris), je-ne-sais quelle révélation (transcendante) comme quoi la vie devrait être ceci ou cela... même si bien sûr, l'idée de la mort donne par exemple une idée du temps d'une vie, ce qui n'est pas rien.

Si l'on veut chercher la part de la mort qui se rapporte à la vie (la vie, seul sujet qui fasse sens pour Deleuze), on peut se référer au texte : "L'immanence, une vie" (dont on a déjà parlé). Il y est question du fait que :
-l'individuation est chez Deleuze la seule échelle acceptable de sens,
-l'immanence d'une vie le seul témoin de l'univocité de l'être.

Pour moi, ça répond.
http://www.youscribe.com/catalogue/tous ... ie-2487134

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar hokousai » 08 juin 2015, 18:30

je-ne-sais quelle révélation (transcendante) comme quoi la vie devrait être ceci ou cela...
ah mais je suis d'un prosaïsme naïf.
Je mange du poulet par exemple... pas du poulet vivant :wink:
C'est ça qui fait sens ... pas ma mort comme inquiétude ou comme ce à quoi il n'est pas sage de penser (ou inversement).

Je pense en bio-logiste. Il y a des organismes vivants et puis qui meurent.

J' ai côtoyé, il y a si longtemps des "études de philosophie",( puisqu' il fallait faire des études )
On nous distribuait des cours de logique, mais pas de zoologie (encore moins de botanique).

aldo
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 485
Enregistré le : 13 janv. 2015, 11:33

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar aldo » 08 juin 2015, 21:41

Bien bien...
À ce stade de la discussion, je suggère de reprendre les intensités deleuziennes pour rebondir sur la représentation afin d'amener à l'empirisme transcendantal qui, via le problème de l'interprétation, devrait très logiquement nous faire revenir à la notion de plan d'immanence pour déboucher sans mollir au problème du corps et de l'esprit chez Deleuze (et Spinoza, ça va de soi).
À moins que tu ne souhaites antérieurement passer par le problème de l'élevage des poulets en batterie afin d'être bien sûr de ne pas occulter le fond du problème ?

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Re: cours de gilles deleuze sur spinoza

Messagepar hokousai » 09 juin 2015, 00:39

le problème de l'élevage des poulets en batterie
Sûr que si on fait relever cette question de la logique ( ce que fait Spinoza soit dit en passant ) on passe à côté de ce qui dérange dans cette question.
Voila bien des corps dans la nature qui semblent avoir si peu d'esprit qu'on peut les élever en batterie.
De là à ne voir dans l' homme que si peu d'esprit, qu'on puisse lui aussi l'élever en batterie . :(

Problème soulevé par Peter Sloterdijk d' ailleurs
« il faudra convoquer dans les prochaines années des états généraux des sciences de l'homme pour discuter des limites de la biotechnologie et de la formulation d’un code de conduite »
http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A8gles_pour_le_parc_humain


Retourner vers « Actualités »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 28 invités