Messagepar Henrique » 15 févr. 2008, 03:08
On peut toujours espérer que nos frères belges arriveront à obtenir un référendum, là où la France s'est faite entuber sévèrement par la caste politique dite de gouvernement, avec la complicité de médias complaisants.
En 2005, il y a eu une consultation sur un texte sur lequel on pouvait argumenter en citant des passages précis. En 2007, celui qui devait un peu plus tard devenir le garant des institutions républicaines et démocratiques a profité de la confusion propre à la campagne présidentielle où toutes sortes de questions sont agitées et où on vote autant pour telle mesure phare que contre celles qu'on ne veut pas voir arriver, rarement pour toutes les propositions. L'élection du président ne pouvait donc en aucun cas légitimer de défaire par voie parlementaire ce que le suffrage universel direct avait fait. On avait déjà un président qui s'est très vite assis sur la constitution en s'accordant de fait des prérogatives réservées au premier ministre, sans qu'aucune révision de la constitution n'ait eu lieu et cela sans que personne ne semble voir que quand l'autorité se place au dessus des lois, elle devient de fait despotique ; on a maintenant la preuve qu'il s'assoit aussi sur la souveraineté populaire.
La démocratie pour un oligarque n'a d'intérêt que si le peuple vote "comme il faut", c'est-à-dire de façon à renforcer son pouvoir, en l'éternisant par la loi. La condition pour que l'oligarchie accepte quelque apparence de démocratie : que le peuple vote comme il faut, pour les "bons" candidats et les "bonnes" réponses en cas de référendum. Si le peuple se "trompe", ce n'est pas bien compliqué, on s'assoit sur la démocratie en se contentant de donner au peuple l'assurance qu'on l'a bien entendu de toutes façons.
Ainsi nous impose-t-on un texte sur lequel il n'y aura eu aucun débat, pas même entre parlementaires, censés nous représenter alors même que 60% de la population était favorable à une consultation référendaire (mais ce chiffre là, les médias de masse si friands de sondages habituellement, ont su le taire). Texte manifestement beaucoup plus difficile à lire encore que le précédent mais qui a, de l'aveu même de ses partisans européens, la vertu de maintenir l'essentiel du processus de libéralisation forcée de l'Europe et de remise en cause des conquêtes sociales d'après guerre. Même plus besoin de l'accompagner de gadgets, comme le droit de pétition, destinés à étourdir le chaland.
Dans cette affaire, le PS, sous direction de François Hollande et de ses camarades "rénovateurs", a prouvé à quel point il peut se faire complice de cette trahison de la souveraineté populaire. Ce parti avait la possibilité d'empêcher le vote de cette forfaiture en votant non, car il fallait une majorité des deux tiers. Au contraire, il a trahi sa propre parole en prétendant que s'abstenir était une attitude cohérente par rapport à l'engagement pris en campagne présidentielle pour que seul le peuple puisse défaire ce qu'il avait fait.
Bien sûr, il y a eu quelques socialistes restés authentiques, toujours les mêmes, Emmanuelli, Mélenchon, Quilès, Lienemann... et qui ont sauvé l'honneur de leur parti en votant non. Mais il n'y a pas d'avenir possible avec une telle organisation, depuis trop longtemps dominée par des notables plus attachés à leurs privilèges sociaux qu'à agir en cohérence avec les idées qui étaient censés guider leur rassemblement. L'avenir est dans la constitution d'un parti comme celui qu'a rejoint Oscar Lafontaine en Allemagne (die Linke), réformateur, mais pas pour rire, et cohérent avant tout. Force est de constater qu'en France, on n'a pas encore de gauche cohérente et crédible. Cohérente = certainement pas sociale-libérale à la Clinton/Blair. Crédible = pour l'essentiel, qui évite les casseroles et les mots trop chargés historiquement comme "révolutionnaire", "communiste" ou encore les mots creux comme "antilibéral". Mais ce qui ne contient pas de contradiction et correspond à une aspiration partagée finit toujours par advenir.