Spinoza et les femmes / le "parallélisme"

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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Messagepar Ulis » 16 déc. 2007, 15:34

Et pourtant, chère Louisa, on peu abstraire la pensée d'un corps (lobotomie) alors que l'inverse est faux. Il y a lien de causalité entre eux, car rapport physique entre eux, et si l'un est nécessaire, l'autre est contingent
amitiés
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Messagepar Louisa » 16 déc. 2007, 15:44

Cher Ulis,

qu'est-ce qui arrive quand on fait une lobotomie? On enlève une partie du cerveau. Comme tu le dis, on sait qu'immédiatement, une partie des pensées a également disparu (du point de vue de la personne chez qui on a effectué la lobotomie).

Mais comment croire que cette opération consisterait à séparer (ou abstraire) de la pensée d'un corps??? La pensée que cet esprit a perdu, c'est tout de même celle qui forme un tout avec le lobe enlevé, autrement dit celle qui était et reste unie à cette partie du corps?

Comment ferais-tu pour abstraire cette pensée, qui appartenait au tout constitué par elle-même et ce lobe-là, du même lobe ... ? Dès qu'on conçoit lobe et pensée comme CONSTITUTIVE du même tout, toute abstraction devient inconcevable, non?

Sinon je n'ai pas très bien compris ce que tu veux dire par ta deuxième phrase?
Louisa

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Messagepar hokousai » 16 déc. 2007, 17:49

Il est clair aussi qu'en cela nous disposons également d'une plus grande connaissance de l'esprit ou des pensées humaines. Tout cela n'est pas contraire à ce que Spinoza dit


à Louisa

je ne suis pas du tout certain que nous ayons une plus grande connaissance des pensées humaines que du temps de Spinoza .

Les neurosciences nous donnent des connaissances sur ce que pense le neuro- biologistes des pensées humaines .


Ce que dit Ulis n’est pas très clair :
Lors de la lobotomie il y a destruction d'une partie du corps et destruction d'une partie de la pensée .
ce qu dit Spinoza est que nous ne pouvons concevoir une relation entre les attributs .

Effectivement je ne vois pas de relation claire entre le biochimique ( étendue ) et les idées (pensée ).

Les idées ne m'apparaissent pas comme du biochimique et c'est pourquoi je ne vois pas de relation .
Je ne peux en concevoir clairement. Je peux seulement en poser d 'occultes .

hokousai

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Messagepar Ulis » 16 déc. 2007, 20:19

"rapport physique entre eux"
Si, en ôtant de la matière on ôte de la pensée, la pensée est matière, non ?
ulis

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Messagepar Louisa » 16 déc. 2007, 21:45

Ulis a écrit :
Si, en ôtant de la matière on ôte de la pensée, la pensée est matière, non ?


Donc selon toi si en ôtant X on ôte aussi Y, Y doit forcément être X? Autrement dit, X ne peut pas être différent d'Y, et X ne peut pas non plus s'identifier à Y (car s'il y avait identité, Y était autant X que X est Y)? On dirait donc que pour toi si en ôtant X on ôte aussi Y, X doit forcément être une PARTIE d'Y. Si oui: pourquoi?

Traduit dans ce cas-ci: si en ôtant la matière on ôte aussi la pensée, la pensée doit forcément être la matière.

Autrement dit, la pensée ne peut pas être différente de la matière (mais alors pourquoi l'appeler "pensée"?), et la pensée ne peut pas non plus s'identifier à la matière (car s'il y avait identité, la matière était autant de la pensée pure que la pensée de la matière pure). La pensée doit donc être une partie de la matière, dans cette optique, non? Alors je suppose que tu vas dire que la pensée est une espèce de matière un peu particulière. Un type de matière très précis.

Tout cela me semble être fort intéressant. Mais je ne vois pas en quoi les sciences actuelles permettraient de privilégier cette idée spéculative (la pensée est un type de matière tout à fait spécifique) par rapport à celle de Spinoza (matière et pensée sont deux expressions différentes d'une seule et même chose: moi). Toi oui?
Cordialement,
Louisa

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Messagepar Louisa » 16 déc. 2007, 21:53

hokousai a écrit :Louisa:
Il est clair aussi qu'en cela nous disposons également d'une plus grande connaissance de l'esprit ou des pensées humaines. Tout cela n'est pas contraire à ce que Spinoza dit.

Hokousai:
je ne suis pas du tout certain que nous ayons une plus grande connaissance des pensées humaines que du temps de Spinoza .


en effet, j'y allais un peu vite. Il faut adopter l'idée selon laquelle les sciences se développent en accumulant toujours davantage de savoir pour pouvoir supposer que nous avons aujourd'hui plus de connaissance neurobiologique du cerveau qu'il y a trois siècles. Je ne suis pas capable de démontrer cette conception cumulative. Toujours est-il que pour l'instant j'ai tendance à y croire (ne fût-ce que parce qu'il y a trois siècles, la neurobiologie n'existait même pas encore .. du coup, supposer que nous avons davantage de connaissance neurobiologique aujourd'hui qu'à l'époque me semble être assez évident).

hokousai a écrit :
Les neurosciences nous donnent des connaissances sur ce que pense le neuro- biologistes des pensées humaines .


je dirais plutôt que les neurosciences nous donnent des infos sur l'aspect neurobiologique du cerveau humain. Spinoza y ajoute: ces infos sont cruciales pour apprendre quelque chose de notre esprit. C'est en ce sens qu'un progrès des neurosciences devrait logiquement également conduire à un progrès de la connaissance de l'esprit, du point de vue spinoziste, il me semble.
Amitiés,
Louisa

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Messagepar hokousai » 16 déc. 2007, 22:27

à Louisa

Nous avons davantage de connaissances neurobiologiques aujourd'hui qu'à l'époque me semble évident.

Mais pas évident du tout que nous ayons une meilleure connaissance des idées (de nos idées )

Ulis ( pas Spinoza )y ajoute: ces infos sont cruciales pour apprendre quelque chose de notre esprit.
Elles apprennent quelques choses du cerveau . Le cerveau ce n’est pas la pensée .
Donc elles n’apprennent pas sur la pensée .

La neurobiologie ne m’apprend rien sur ma pensée, c’est moi ( ma pensée) qui apprend au neurobiologiste à repérer des événements dans l’étendue , événements co-présents .
Mais la coprésence n’implique pas une relation causale .

La pensée, la pensée philosophique , gagne –t-elle à savoir qu’il se passe en même temps des événements biochimiques?
Est-ce que quand vous pensez la justice , il est utile de savoir qu’il se passe telle ou telle modifications chimiques ?

Autrement dit pouvez -vous traduire en chimie l' Ethique de Spinoza ?
Peut- être( à terme ) , mais quel est l'intérêt de ce genre de traduction ?.

Penserez- vous un jour en formule de chimie ?

hokousai

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Messagepar hokousai » 16 déc. 2007, 22:31

je ferais remarquer à Ulis que pour un lobotomisé il n y plus de matière non plus .

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Messagepar Louisa » 16 déc. 2007, 22:54

hokousai a écrit :Ulis ( pas Spinoza )y ajoute: ces infos sont cruciales pour apprendre quelque chose de notre esprit.
Elles apprennent quelques choses du cerveau . Le cerveau ce n’est pas la pensée .
Donc elles n’apprennent pas sur la pensée .


vous trouverez sur la page 2 de cette discussion la citation de Spinoza (EIIP13 scolie). A mon sens, il y dit littéralement qu'il nous faut passer par une connaissance du corps pour obtenir une connaissance de l'esprit, non?

En effet, pour lui le cerveau n'est pas la pensée. Mais c'est parce que esprit et corps sont une seule et même chose que l'on apprend inévitablement quelque chose sur l'esprit quand on étudie le corps.

La neurobiologie ne m’apprend rien sur ma pensée, c’est moi ( ma pensée) qui apprend au neurobiologiste à repérer des événements dans l’étendue , événements co-présents .
Mais la coprésence n’implique pas une relation causale .


Qu'il faut apprendre au neurobiologiste ce qu'on pense en le communiquant verbalement signifie seulement que ses instruments matériels de mesure ne savent pas capter la pensée. Mais pourquoi cela signifierait-il que les connaissances neurobiologiques ne nous apprennent rien sur l'esprit?

La pensée, la pensée philosophique , gagne –t-elle à savoir qu’il se passe en même temps des événements biochimiques?
Est-ce que quand vous pensez la justice , il est utile de savoir qu’il se passe telle ou telle modifications chimiques ?


A mon sens toutes les sciences peuvent apporter quelque chose d'intéressant à la philosophie. Les sciences nous renseignent sur la structure du réel (matériel, dans la majorité des cas). Alors oui, je crois qu'en tenir compte peut rendre une pensée philosophique plus solide. Si l'on veut se lancer dans la spéculation, autant savoir sur quoi il ne faut plus spéculer, parce qu'il en existe déjà des preuves.

Je crois donc que c'est dans ce sens que Spinoza a dit qu'il faut connaître le corps pour connaître l'esprit: il faut tenir compte de ce que peut un corps pour apprendre quelque chose sur ce qui a ce corps comme objet (l'esprit). Mais cela ne signifie pas que pour spéculer/penser philosophiquement, il faut savoir en même temps quelle molécule fait quel mouvement dans son propre cerveau.

Autrement dit pouvez -vous traduire en chimie l' Ethique de Spinoza ?
Peut- être( à terme ) , mais quel est l'intérêt de ce genre de traduction ?.

Penserez- vous un jour en formule de chimie ?


à mon humble sens, la question n'est pas là. Qui veut communiquer une idée spéculative a besoin d'un livre et de propositions langagières. Qui veut communiquer une information obtenue par rapport au niveau chimique du monde, a besoin d'un livre et de formules chimiques.

Or l'homme est un être qui se situe à beaucoup plus de niveaux que seulement au niveau chimique. Donc non, la chimie ne peut pas 'résumer' l'aspect corporel de l'homme. Il faudra également de la physique, de la neurophysiologie, de la biologie, de l'embryologie, et ainsi de suite, avant de pouvoir dresser un bilan provisoire de nos connaissances actuelles du corps humain.

D'ailleurs, jamais nous ne connaîtrons tout de nous-mêmes. Il est donc bien possible qu'une pensée spéculative concernant l'esprit traite de cette partie de nous dont il faudra encore attendre très longtemps avant d'en obtenir quelques données 'parallèles' concernant le corps. Tout comme il est bien possible que ce que nous savons du corps pour l'instant ne nous dit pas grand-chose sur l'essence de l'esprit.

En tout cas, à mon sens le parallélisme spinoziste ne signifie pas du tout que l'on peut réduire l'une (pensée) à l'autre (savoir du corps). Les deux, esprit et corps, CONSTITUENT l'individu. Cela implique que dès qu'on essaie de faire abstraction de l'un, on crée également une idée abstraite de l'individu. Ainsi un parallélisme n'est ni un idéalisme, ni un matérialisme. Il pense l'union des deux aspects, unité quantitative de divers qualités expressives (qualité objective, qualité(s) formelle(s)).
Bonne nuit,
Louisa

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Messagepar hokousai » 17 déc. 2007, 00:04

à Louisa

Mais cela ne signifie pas que pour spéculer/penser philosophiquement, il faut savoir en même temps quelle molécule fait quel mouvement dans son propre cerveau.


Je ne vous le fais pas dire .

Alors , quelle est l'utilité de ce savoir ?
Vous voulez penser le corps humain ! très bien je ne vois pas de problèmes. Mais si vous voulez penser la pensée alors ce n'est pas en observant le corps humain mais en observant la pensée que vous le pourrez.

Vous n'observez aucune pensée en observant des variations électriques neuronales .Ce que vous observez ce sont des variations électriques .
..............
Ce que vous semblez oublier dans votre apologie du parallélisme est qu il est l'oeuvre de la pensée , c'est une déduction théorique.

Quand Spinoza dit qu’on ne sait pas ce que peut le corps il pensait (à mon avis) qu on ne peut pas le savoir . Car ce qu on peut savoir et seulement c’est ce qu’on pense .
Nous n’avons un accès au corps que médiatement , ce que nous connaissons immédiatement c’est la pensée .Il y a dissymétrie essentielle pour nous entre les deux attributs (auxquels nous avons accès )
Je maintiens que le spinozisme est une forme d’ idéalisme qui se sauve de l’idéalisme par la déduction et essentiellement par la théorie des attributs .( il s’en sauve alors que Berkeley par exemple ne s’en sauve pas , les aristotéliciens sont empiristes .Spinoza a une position originale )


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