Vanleers a écrit :Que signifie « distinction absolue » ?
Qu'elle est placée au niveau de la Nature naturante même. Ou alternativement qu'il est dit que les attributs n'ont aucun rapport l'un avec l'autre (d'ajouter que c'est tout en même temps Dieu indistinctement n'est pour moi qu'une superposition ; et cela n'empêche pas les contradictions de surgir, comme dit, qu'il faut bien aussi prendre en compte.)
Vanleers a écrit :N’est-il pas indiscutable que nous pouvons concevoir de façon claire et distincte la pensée sans penser à l’étendue et réciproquement ?
Si c’est indiscutable, alors il y a une différence réelle (absolue) entre la pensée et l’étendue.
Ce n'est pas aussi simple. Ce peut être indiscutable - sous réserve : en la matière, l'erreur se tient à un micron de la vérité - au niveau du mode conscient, et tout en même temps discutable au niveau de Dieu (révélé "dans" le mode conscient et non au dehors, ce qui impossible)... Et encore une fois, il y a des problèmes patents sous-jacents à cette façon de présenter les choses, qu'il faut prendre en compte aussi.
Vanleers a écrit :Ma première intervention sur le site spinozaetnous (en Novembre 2012) a été de faire la remarque suivante :
Dans la définition 6 d’ E I, Spinoza parle, à propos de Dieu, d’« une infinité d’attributs » (traduction Pautrat), expression qu’il reprend dans l’explication qui suit la définition.
Il me semble que l’on comprend mieux cette expression si on entend, non pas « des attributs en nombre infini » mais « tous les attributs possibles ». Cela évite de faire appel à la notion de nombre et puis Spinoza écrit, au début de la démonstration d’E I 14, que, de Dieu » « nul attribut exprimant l’essence de la substance ne peut être nié ».
J'ai moi-même fait cette remarque auparavant, entre autre ici (dernier message), mais, comme j'en discute en même temps, il ne suffit pas d'agrémenter les choses pour les rendre pures : à partir du moment où on a posé 2, c'est foutu quand-même... Et il a des problèmes patents associés, etc.
Vanleers a écrit :Revenant à votre message, que nous ne puissions parler de l’étendue et de la pensée qu’en ayant recours au nombre 2, auxiliaire de l’imagination, c’est évident, mais cela ne révèle-t-il pas plutôt les limites de l’expression de la pensée humaine sans remettre en cause l’architecture de la substance exposée par Spinoza ?
Eh oui, c'est tout le problème : ce qu'il faut impérativement laisser au niveau du mode humain, et ce qu'il faut mettre au niveau de la substance. Que ce soit juste un problème d'expression n'est pas une explication valide selon moi, mais une intuition globale n'est effectivement pas forcément décomposable sans trahison... Et c'est bien dans l'esprit humain que se révèle la substance ; pas en dehors.
Personne n'a le fin mot de l'affaire...
Vanleers a écrit :3) Sur E II 47
Je n’ai pas d’objections à formuler à ce que vous écrivez dans votre dernier message.
Par contre, vous avez écrit précédemment :
« Tant qu’on n’a pas vu directement sans conceptualisation (il s’agit d’une notion commune purement intuitive et PREMIERE) ce que désigne E2P47, et qui fonde toute l’Ethique, on ne peut pas avoir compris l’Ethique. »
Ici, je ne suis pas d’accord.
D’abord, cette proposition, aussi importante soit-elle, a une portée moins grande qu’E I 15 à laquelle fait implicitement référence le scolie d’E II 47 :
« Tout ce qui est, est en Dieu, et rien ne peut sans Dieu ni être ni se concevoir »
Je crois qu'à nouveau vous confondez la chose même avec les propositions qui en parlent a posteriori. A partir du moment où Dieu est LA notion commune essentielle, base première de l'Ethique (non démontrée par nature), elle est intuitive et immédiate. Si vous la voyez telle, vous êtes des très rares happy few que porte cette terre. Sinon, il s'agit plus ou moins d'un simple concept, d'une hypothèse - ce qui est très loin d'être au niveau requis pour le premier cas de figure - et alors la question à se poser est : "cette idée intuitive, directe de Dieu que tout le monde a, mais dont presque personne n'a pleine conscience, à quoi ressemble-t-elle exactement ? Pas à un barbu assis sur un nuage, c'est déjà sûr..."
Vanleers a écrit :L’expérience m’a montré, jusqu’à ce jour, que des pensées étrangères à Spinoza pouvaient stimuler la réflexion et m’encourager à approfondir sa philosophie. Mais que cette dernière était non miscible avec des démarches spirituelles de tous ordres (occidentales ou orientales) et qu’à vouloir tenter des rapprochements, je m’étais toujours égaré.
Vous aurez compris que ma façon de voir est radicalement opposée. Et je ne fais aucun syncrétisme en la matière : si ce n'est vraiment pas compatible (en théorie), sur l'essentiel, je m'incline. Il n'y a qu'une seule Spiritualité, fondée dans la Nature éternelle, préoccupation première éternelle des hommes depuis toujours par Nature (et Spinoza place par exemple explicitement Jésus de Nazareth au zénith.) Et si ce n'est pas universel et suprêmement important, l'intelligence ordonne de se taire dans la seconde pour sortir profiter de la Nature... Spinoza - en prolongement du Stoïcisme - comme le Bouddhisme et l'Advaïta Vedanta, le chamanisme amérindien, le Taoïsme, le Soufisme, ..., Stephen Jourdain (éduqué dans l'anticléricalisme et parlant quand-même de Dieu, "comme" le fait Spinoza), etc., etc. : tous se rejoignent là pour l'essentiel. Ou sinon la confrontation est fertile. Même si des Maîtres voient un essor de la chose assez net actuellement, l’Éveil reste rare, et même très rare (1 / 1 000 000, comme le dit - "à la louche" - la Baghavad Gita ? Cela me semble une estimation raisonnable, à un ordre de grandeur près disons.) Donc pour tout le monde (ou presque), une certaine circonspection reste de mise, et un gros effort de retour à la saisie intuitive, immédiate.
Vanleers a écrit :6) Sur la joie comme guide possible
Toute la fin du scolie d’E V 20 développe le remède « magistral » aux affects qu’est l’amour envers Dieu. Une joie donc.
Mais largement a posteriori...