Bruno31415 a écrit :Puisque Dieu possède une infinité d'attributs et qu'un attribut est ce que l'entendement perçoit de la substance, si l'entendement de E1D4 est humain, alors nous devrions percevoir une infinité d'attribut. Or, nous n'en connaissons que deux : pensée et étendue.
Dans ces conditions (mais il n'y a aucune contradiction, en fait : nous pouvons très bien saisir un attribut - deux au moins, en fait, sinon "attribut" ne se distingue pas de "substance" -, et donc sa définition, sans pour autant les saisir tous), le problème serait insoluble, car quoi que constitue l'entendement infini nous ne pouvons de toute façon concevoir que selon le nôtre, qui est fini...
L'infinité d'attributs est une induction à partir des deux attributs connus. La raison selon moi est que le nombre de 2 ne convient pas à la nature divine (c'est soit 1, soit l'infini.) Parler d'une infinité d'attributs n'a aucune autre raison d'être (nous ne pouvons pas en traiter de toute façon.)
Je précise en outre qu'il est clairement dit par Spinoza qu'il ne faut pas confondre l'entendement humain et l'entendement divin, qui n'ont entre eux qu'une convergence toute nominale (dans une certaine mesure.)
Voir par exemple les extraits sur
la connaissance.
Bruno31415 a écrit :D'autre part, je lis, à propos de E1D4, dans le cours de Y Dorion, disponible en téléchargement sur le site...
Comme je l'ai dit, pour moi, s'agissant du début de l'
Ethique il s'adresse à ce que le lecteur connaît, savoir son propre entendement, qui est fini (encore qu'il s'adresse à des doctes, c'est vrai.) mais l'entendement fini étant une partie de l'entendement infini et Dieu ayant par cet entendement idée de lui-même et donc connaissance de tout, le point est assez trivial en fait.
La formulation cependant : "ce que l'intellect perçoit d'une substance comme constituant son essence" correspond mieux à un intellect humain à mon goût, car Dieu a tout simplement l'idée de lui-même.
Bruno31415 a écrit :Pourrais-tu me donner une définition du mot entendement tel que l'utilise Spinoza ? (Une définition assez simple - même si elle n'est pas très correcte -, je ne m'y connais pas assez pour entrer dans les subtilités, il me faudrait juste un point de départ).
Puisque tu insistes, nous pouvons considérer E1P31S : "[L'intellect (en acte) :] je n'ai voulu parler que de la chose perçue par nous le plus clairement du monde, je veux dire l'intellection elle-même, que nous percevons plus clairement que tout. Car il n'est rien que nous puissions comprendre par l'intellect qui ne contribue à une plus parfaite connaissance de l'intellection."
Il n'y a pas, ainsi que pour l'idée, de définition parfaitement descriptive, parce qu'une définition suppose que les mots utilisés ont eux-même un sens clair (aucun sens ne venant des mots eux-mêmes.) Or ici il s'agit du sens même : comprendre, connaître, c'est porter du sens (ceci rejoint le fait que la vérité est à elle-même sa norme.) Autrement dit, comme Spinoza le dit en substance par ailleurs : c'est en connaissant qu'on sait ce que connaître veut dire.
Disons que l'entendement recouvre toutes les représentations (mentales) ou idées, soit tout ce qui dans le Mental relève de la connaissance (et pas les désirs et les émotions.)
Pour un entendement fini, c'est une notion générale : il n'y a que des idées individuelles en réalité (qui n'en ont pas moins une essence commune, savoir l'affirmation de quelque chose.)
Pour l'entendement infini, c'est une unique idée qui couvre tout.
L'entendement fini est une fraction, une discrétisation de l'entendement infini : soit tronquée (idées inadéquates), soit intègre (idées adéquates.)
Serge
P.S. Je précise que Spinoza utilise le terme "entendement" (humain) sous deux acceptions : 1) Une générale qui recouvre toutes les idées, comme dit. 2) Une restreinte qui ne recouvre que les idées adéquates, voire éventuellement que les intuitions du troisième genre. Le contexte indique en général sans trop d'ambiguïté de laquelle il s'agit.
Connais-toi toi-même.