olfa a écrit :Bonsoir Joel, je vous remercie infiniment pour votre exposez et le temps que vous me consacrer, plus je lis vos commentaires plus je me dis mais tu sais cela donc pourquoi te crées tu de fauses idées qui t'empeche d'avancer alors que je sais très bien comme vous l'avez très joliment dit: "On est le soleil qui brille toujours de lui-même." Peut etre que mon problème vient du fait que je ne peux partager cette vérité avec mon entourage. Vous arrive t-il parfois d'etre perdu dans de telles pensées qui comme vous le dites : "On peut dire alors que la pensée écrase la vie."
Une deuxième question s'il vous plait que voulez vous dire par "tous les hommes s’éprouvent eux-mêmes mais la plupart ne se comprennent pas". Voila merci énormément pour votre aide qui m'es très précieuse bien à vous Olfa
Merci Olfa de vos réactions
Vous me poussez à m’exprimer et à partager
vous écrivez << Vous arrive t-il parfois d'être perdu dans de telles pensées qui comme vous le dites : "On peut dire alors que la pensée écrase la vie.">>
Oui ,bien-sur ,mais ces moments ne sont pas forcement négatifs , on peut les prendre comme des occasions pour mieux nous comprendre
Et je fais le lien avec votre question sur "tous les hommes s’éprouvent eux-mêmes mais la plupart ne se comprennent pas".
En fait en écrivant cela, je pensais à certains enseignements qui prônent l’observation de soi, la conscience de soi, de nos pensées etc.
En tant que discipline ou pratique méditative, on peut passer ainsi sa journée à s’observer, à essayer d’être attentif, présent à soi ou au monde etc.
J’ai pratiqué cela pendant des années jusqu'à ce que j’en comprenne l’absurdité.
C’est considérer que la conscience peut manquer à elle-même et donc est relative
or la conscience est absolue et parfaite ou n’est pas.
Elle ne connait pas la dualité ni le manque
Cette façon dualiste d’aborder la conscience est le fait d'une pensée inadéquate..
En réalité, on est toujours conscient : on ne peut pas penser sans savoir qu’on pense ; on ne peut pas percevoir le monde sans savoir qu’on perçoit le monde, on ne peut pas vivre sans savoir qu’on vit etc.
Ce savoir est donc déjà donné, réalisé et on n’a pas à s’en soucier
Mais ce savoir est sans distance, direct, non médiatisé par des pensées c’est un éprouvé
En fait je le rapprocherai de ce que Sartre appelle conscience pré- réflexive
Cette conscience est translucide à elle-même .
elle se sait elle-même mais sans écart ni distance, c’est une conscience non positionnelle d’elle-même. elle ne se voit pas comme on voit un objet.
C’est une conscience pure, absolue, spontanée, dépourvue de contenu, vide, néant cad non chose, non objet et du fait de l’absence de détermination qui pourrait la limiter, elle est totale liberté .
Mais si elle ne se pose pas elle- même, elle est pose le monde, elle est conscience du monde et ouverture totale à lui, et parce qu’elle n'est rien, rien ne la sépare du monde, elle devient le monde ou plutôt le monde la reflète et l’exprime.( unité de soi et du monde )
mais c’est sans compter sur l’homme ( cad la pensée ) qui, effrayé par sa propre liberté , par le vide qu’il est et qu’il pressent et donc de son absence de fondement( objectif) ,s’empresse de se nier et de se fuir
et va partir à sa recherche . et c’est la condition humaine:
une quête, d’abord ,à l’extérieur, dans le monde
et ce sont tous les désirs et les passions et diverses compensations qui visent à combler un manque fondamental d’être, et c’est pourquoi ces désirs d’objets sont en réalité désirs d’être, désir de soi.
Comprenant l’impossibilité de trouver ce qu’il cherche dans le monde l’homme se dirige vers l’intérieur et va tenter de faire de lui-même son propre fondement : et c’est le cogito réflexif ‘ le ‘’je pense donc je suis ‘’de Descartes ou la recherche de dieu
C’est là que Sartre fait la différence entre la conscience de soi et la connaissance de soi
La pensée est par nature pensée de quelque chose, positionnement d'objet, visée du monde
et cette visée implique une distance entre un sujet qui vise et un objet visée.
Autant c’est légitime par rapport au monde et l’action (çà se fait tout seul c’est ce qu’on appelle la perception) autant c’est illégitime par rapport à soi-même.
Et la connaissance de soi ou cogito réflexif est cette tentative de se poser soi-même comme un objet, de se fonder soi -même ( je pense donc je suis ).
Mais c’est voué à l’échec car même si, dans le cogito, la certitude de soi est indubitable çà ne peut pas durer car on n’est pas un objet
et la pensée en se tournant vers elle-même, se bloque et se ferme au monde
et crée une véritable opacité entre elle et monde.
Cette opacité, c’est l’égo ou conscience réflexive, avec toute sa production : notre vie psychique.
Sartre disait que cet égo est nuisible et inutile.
On voit bien qu’il n’est pas une réalité mais une apparition dans notre conscience
Mais je ne veux pas opposer conscience et pensée
La pensée n’est pas différente de la conscience, la pensée c’est la conscience de quelque chose et la conscience pure, c’est en quelque sorte l’intérieur de cette pensée et qui est pure présence à soi
On peut dire que toute conscience est conscience de quelque chose (Husserl ) et en même temps conscience d’elle-même mais pas de la même façon .
L’un est un pensé et l’autre un éprouvé et si on les confond comme dans le cogito réflexif, alors on tombe dans le piège de la réification de la conscience où celle-ci de sujet devient objet.
Et je pense que les pratiques méditatives dont je parlais plus haut sont de types réflexifs et ne mènent nulle part .
Ce n’est pas un hasard si Krisnamurti n’a cessé de les critiquer
Pourtant il parlait bien de se connaitre, d’observation et de méditation
Mais pour lui cette observation ou méditation ne pouvait qu’être non délibérée, non intentionnelle, spontanée et donc surtout pas une pratique que la pensée décide
car alors la pensée crée un observateur ( l’égo ) et donc la dualité entre un observé et quelqu’un qui observe.
Pour lui l’observation véritable est pure, sans observateur donc sans division ni distance, elle n’a pas besoin de la pensée et de la volonté pour commencer, elle survient d’elle-même
et comment ?
Par le travail de la compréhension, de l’intelligence
et cette compréhension n’agit pas de façon mécanique mais graduellement et naturellement
On se surprend à fonctionner, à penser d’une certaine façon
et parce qu’on fait le lien avec quelque chose que l’on a compris ,par ex à la lecture de Krishnamurti ou de Spinoza , on prends de la distance par rapport à cette façon de penser que l’on juge erronée etc.
et progressivement on intègre une nouvelle compréhension, on se libère des idées dualistes ou idées inadéquates.
Donc on n’a pas besoin d’être conscient de nos pensées dans le sens de les percevoir car on les perçoit toujours de façon immédiate et spontanée cad on les éprouve.
Par contre on a besoin de les comprendre, d’avoir l’intelligence de soi-même et de travailler pour cela.
Sinon on ne fait que subir ses pensées, subir sa vie, survivre
On est balloté par elles, par nos passions et l’imagination, on ne fait que réagir.
on ne connait les choses que par leurs effets et non pas leur causes comme dit Spinoza : c’est ( 1er mode de connaissance )
ce travail c’est le 2e mode de connaissance ( la raison , comprendre ) qui consiste à connaitre les choses par leur cause, à établir des rapports, des relations entre les choses que l’on vit afin d’en être plus la victime et pouvoir espérer les maitriser ,
le 2e mode pacifie notre esprit et le prépare au 3e mode de connaissance qui émergera de lui-même.
Ce mode intuitif n’est plus la connaissance des rapports mais la connaissance de l‘essence des choses, de soi -même et du monde
Ps. – vous écrivez << Peut être que mon problème vient du fait que je ne peux partager cette vérité avec mon entourage >>
C’est un ressenti, un désir mais pourquoi un problème
Si on se situe au niveau pré-réflexif, il n’y a ni problème ni manque car plus personne pour les porter
Mais je pense que, de toutes les façons, on donne toujours ce que l’on a et ce que l’on est
et si on a un peu de lumière en soi, on peut être sur qu’elle se répand et illumine autour de soi mais pas forcement de la manière dont on pourrait le penser ou l’espérer
, çà peut-être silencieusement, par notre manière d’être, notre sourire, certaines actions etc. pas forcement par la parole
A mon avis, il n’y a pas à se soucier de cela. La lumière ne nous appartient pas.
Amicalement joel
ps bis - je ne garantis pas que ce que j'ai dit sur Sartre soit fidèle à sa pensée .
il ne pensait pas , je crois ,que l'homme puisse coïncider avec lui -même et avec le monde
pourtant il projetait une éthique qu'il n'a pas écrite et suggérait que l'homme pouvait se libérer de la quête de soi, de l'égo et du désir d'être
et redevenir libre cad rester au niveau pre-reflexif ou vie spontanée .
et puis quelqu'un comme Michel Henry a interprété le cogito cartésien differement de sartre, comme un cogito ressenti et non reflexif