Simplicité de la substance et multiplicité du monde

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.
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Messagepar Enegoid » 29 mai 2009, 19:09

Durtal a écrit :La difficulté n’est pas de comprendre comment une essence peut être « plusieurs essences » (cela ce n’est pas je crois « difficile » à comprendre : c’est impossible à comprendre pour la bonne et simple raison que cela ne veut strictement rien dire.) La difficulté est de comprendre qu’une essence puisse avoir plusieurs types d’expressions (et j’ajoute que ce sera le cas de n’importe quelle essence, pas seulement de celle de la substance. Pour un être humain c’est pareil : son essence s’exprimera sous l’attribut de la pensée en même temps que sous l’attribut de l’étendue par ex.)


Mon sentiment est que vous déplacez le problème de l'essence vers un problème lié à "l'expression" de l'essence. Mais qu'est-ce que l'expression de l'essence ?

Si l'expression est une affection alors l'attribut est un mode.
Si l'expression est "l'action de se rendre sensible" (cf dictionnaire) et n'est pas une affection, alors il faut interroger cette notion. Comment qualifieriez-vous cette chose : "l'expression d'une essence" ? Un jus d'orange ?

D'autre part, l'entendement n'est pas idiot. Il ne peut prendre une perception de l'expression d'une essence pour une perception de l'essence elle même. Ce que dit pourtant la définition4. Il ne prend pas le jus d'orange pour l'orange. Quand je perçois l'expression de votre pensée, je me garde bien de penser que je connais l'essence de votre pensée !

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Messagepar Enegoid » 29 mai 2009, 19:18

Alcore a écrit :En fait, selon moi, Dieu a bien une essence, mais cette essence se résout totalement dans sa puissance.


L'essence de Dieu est sa puissance d'agir, l'essence de l'homme est la puissance de persévérer dans son être, ainsi que l'essence de la fourmi.

L'essence, définie comme puissance d'agir, ou de persévérer, laisse totalement de côté la question de savoir "ce qu'est Dieu", ou "ce qu'est l'homme" ou " ce qu'est la fourmi".

Bon, j'exagère : Dieu est un "machin" infini dans tous les sens où l'on voudra bien prendre le mot "infini".

Remplacez "machin" par substance, si vous voulez...puis cherchez la béatitude.

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Messagepar Durtal » 29 mai 2009, 20:36

hokousai a écrit :autre question soulevé par
La raison pour laquelle Dieu exprime son essence sous une infinité d'attributs c'est qu'il existe nécessairement et qu'il est une substance absolument infinie.


L a raison première est qu'il a des attributs ( chez Spinoza il en a )
Il faut donc expliquer pourquoi Dieu a des attributs .

Ce qui ne tient ni de la nécessité ni de l'infinité ,
Peut -être de la perfection ..



Bon...j'aurais bien aimé quand même connaître pourquoi vous niez ceci.

Mais vous me permettrez de vous demander ce qu'est la "perfection de dieu" si ce n'est qu'il est un étant "absolument infini" et qui "existe nécessairement"?

souvenez-vous :"par perfection et réalité j'entends la même chose"


Il est intéressant de comparer le scolie E1pX et l'explication que Spinoza donne de la raison pour laquelle il définit Dieu un être "absolument infini".


hokousai a écrit : De mon point de vue( lequel n ets pas celui de Spinoza sur le sujet des attributs )avoir des attributs peut être compris être moins parfait que ne pas en avoir .
De mon point de vue cette idée d'attribut est une vue de l'esprit .


La substance corporelle une vue de l'esprit ? tssss tssss 8-)

Blague à part: Si je lis ce que pouvait écrire un philosophe il y a plus de trois cent ans c'est justement pour sortir de mon point de vue.

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Messagepar hokousai » 29 mai 2009, 23:54

A Durtal

Bon...j'aurais bien aimé quand même connaître pourquoi vous niez ceci.


Mais parce que la division de l' Etre en substance et accident ( ce qui donne chez Spinoza substance et modes) est antérieure à toute autre spéculation dans la scolastique médiévale dont il hérite .
L’être ainsi divisé est l’ Etre, l’ Etre parfaitement intelligé puisqu’on en est pas d’autres .( d'où ma ""perfectoion !"")

............................................

Les attributs sont ce par quoi la substance inconnaissable (dont l’essence est inconnaissable ) se manifeste .C’est la question des noms de Dieu et de ses qualités essentielles. On est retombé dans la question des universaux .
D’un coté la substance (ou Dieu infini pensable mais non connaissable) de l’autre coté ce par quoi elle se manifeste .
La manifestation se fait à travers des universaux ( les attributs essenteiels )lesquels ont à mon avis pour Spinoza qui suit la tradition juives ( celle des aristotéliciens avicenniens comme Maimonide ) ont une existence à la fois idéelle et réelle ( idéelle car les universaux existent dans l’esprit de dieu )
..................................................

C’est pourquoi je vous disais « L a raison première est qu'il a des attributs ( chez Spinoza il en a )
Il faut donc expliquer pourquoi Dieu a des attributs .
Il a des attributs parce qu il se manifeste .
Ces attributs sont pas le fait intelligé par l’ esprit humain mais existe dans l’esprit de Dieu .

…………………………………………………………

Je n étais donc pas d’accord avec ce que vous disiez
La raison pour laquelle Dieu exprime son essence sous une infinité d'attributs c'est qu'il existe nécessairement et qu'il est une substance absolument infinie.


Car de mon points de vue Dieu pourrait exister ne nécessairement,être infini, être la perfection absolue et ne pas se manifester du tout .
IL n’y a pas dans l’idée de substance l’idée de manifestation .

Cette idée est d’ une part scolastique issue de la division de l être en substance et accidents ?(scolastique chrétienne où Dieu se manifeste , c’est évident ,et certainement plus évidemment que le premier moteur immuable d Aristote ne le fait )
Idée issue d autre part de la tradition hébraïque Dieu se manifeste
(remarquez que chez les grecs les Dieux se manifestaient aussi )

………………..
PS et sérieusement
je n’ ai jamais écrit que la substance corporelle étaie une vue de l’esprit
j ai écrit que l’idée d attribut étai une vue de l’esprit , je ne dirais pas autant de l’idée de mode

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Messagepar alcore » 10 juin 2009, 19:23

hokousai a écrit :Les attributs sont ce par quoi la substance inconnaissable (dont l’essence est inconnaissable ) se manifeste .C’est la question des noms de Dieu et de ses qualités essentielles. On est retombé dans la question des universaux .
D’un coté la substance (ou Dieu infini pensable mais non connaissable) de l’autre coté ce par quoi elle se manifeste .
La manifestation se fait à travers des universaux ( les attributs essenteiels )lesquels ont à mon avis pour Spinoza qui suit la tradition juives ( celle des aristotéliciens avicenniens comme Maimonide ) ont une existence à la fois idéelle et réelle ( idéelle car les universaux existent dans l’esprit de dieu )


La substance est connue dans son "quod" et dans son quid qui sont les attributs. Nous savons qu'il existe au moins une substance, cela ne fait aucun doute; quant à savoir ce qu'elle, ses attributs nous l'apprennent. Ce point est établi par Spinoza à partir des prinicipes de Descartes art 52: l'Etre ne nous affectant pas, et comme nous sommes affectés par quelque chose, il est possible de concevoir la substance au moyen de certaines affections (Spinoza dira des attributs) qui nous font savoir qu'elle existe et comment elle existe.
CEs attributs ne sont pas du tout des universaux. Spinoza fait le raisonnement suivant: toute multitude finie est toujours relative à un genre sous laquelle elle peut être subsumée et qui la désigne. C'est pourquoi toute multitude finie est impure: nous présupposons que quelque chose est commun entre différentes choses et nous les comparons en les soumettant à des genres; tels sont les universaux.
En revanche, il est possible de concevoir un multiple pur, délivré de sa référence à un genre: te est le multiple infini.
Seulement le multiple infini existe lui aussi de façon multiple et infiniment.
La substance est unique seulement parce qu'elle infiniment multiple.
Cette définition de la substance et de ses attributs la situe hors de tout genre: elle est l'Etre absolu parce que supra générique. Ainsi, l'Etre absolument unique peut il être Tout, non au sens d'une somme, mais au sens d'un multiple de multiples infinis. Dès lors toute choses est partie prenante d'un de ses multiples (attribut).

Les attributs ne sont donc pas du tout des universaux. Et la démarche de Spînoza est parfaitement originale. Personne avant lui n'a constitué l'unicité de la substance par multiplication des infinis ! Spinoza, après avoir délivré l'Etre de l'UN, retrouve l'unique par passage à la limite du multiple.

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Messagepar hokousai » 10 juin 2009, 22:33

Nous savons qu'il existe au moins une substance, cela ne fait aucun doute;


ah mais si !! il y a un doute
je comprends le mot substance à partir d' exemples empiriques comme la cire de Descartes , ou l' eau,ou la mélasse, le pétrole que sais je de ce qu'on appelle substance .

Donc je doute qu' il y ait
1)une mélasse universelle
2) en conséquence une seule .

Spinoza n' a pas délivré l' Etre de la substance puis qu'il a clairemnt affirmé la substance

( encore qu'il ait aussi affirmé que la substance et ses modifications c'était la même chose , mais vous ne voulez lire que ce qui va dans votre sens..... à ce sujet le court traité n'est pas la priorité )

...............................


difficile d'affirmer que l' idée d' attribut n'est pas un universel puisqu' elle pointe une qualité commune..... aux attributs ( ce qui constitue en genre l'ensemble des attributs )

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Messagepar Durtal » 11 juin 2009, 00:17

hokousai a écrit :
( encore qu'il ait aussi affirmé que la substance et ses modifications c'était la même chose


Non il affirme ceci des attributs certainement pas des modifications....C'est un peu le problème avec vous en général. Vos critiques sont fondées sur des tas de choses que Spinoza serait censé dire (ou approuver ou présupposer) mais qu'il ne dit effectivement jamais ( ou n'approuve effectivement jamais ou ne ne présuppose effectivement jamais ect...) donc en fait on ne sait jamais sur quel pied danser avec vos critiques (de quoi parlez vous? de vos opinions générales sur la métaphysique ou de la cohérence de la métaphysique de Spinoza elle même? ).


D.

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Messagepar alcore » 11 juin 2009, 11:31

hokousai a écrit :


ah mais si !! il y a un doute
je comprends le mot substance à partir d' exemples empiriques comme la cire de Descartes , ou l' eau,ou la mélasse, le pétrole que sais je de ce qu'on appelle substance .

Donc je doute qu' il y ait
1)une mélasse universelle
2) en conséquence une seule .

)


Nous parlons de Spinoza ou de vos conceptions ?

Les ex que vous prenez sont anti spinozistes et ne peuvent donc servir à réfuter la conception d la substance unique de Spinoza.

Je rappelle le raisonnement

a) tout multiple fini est subsumable sous un genre et nombrable; en ce sens toute diversité finie est relative à un genre, et tou genre relatif à une diversité finie; bref, toute multitude finie est impure.

b) le multiple pur, qui n'est absolument que multiple, sans être multiple de quelque chose, est le multiple infini, supra générique,insubsumable

c) mais il existe plusieurs multiples infinis: car en l'absence d'UN rien n'interdit à l'infini de se multiplier; le multiple pur est infiniment multiple

d) hors de ce multiple infiniement infini iln'est rien, donc il est tout et unique; telle est la substance, constituée donc d'une infinité d'attributs eux mêmes diversifiés en une infinité de modes. L'unicité de la substance est une conséquence de son infinie complexité,ou multiplicité.

Seule le recours au multiple pur permet de dépasser la définition de la substance comme UNE, et d'envelopper tout ce qui n'estpas elle, toutes les choses finies.
La substance n'est donc pas universelle comme la mélasse en général par rapport aux mélasses perçues. C'est tout le contraire. Les choses finies sont toujours liées à un découpage conceptuel et partielleemnt imaginaire dumonde au moyen d'universaux. LA SUBSTANCE DELIVRE DES UNIVERSAUX dans laquelle notre perception dufini est toujours prise.

Ce n'est pas l'unité ineffable de la substance qui fait son unicité, c'est au contraire son absolue infinité. Un multiple "pur" qui n'est multiple que de lui même est en outre parfaitement libre parce qu'il n'a pas être subsumé sous un genre qui lui dicterait ce qu'il doit être.

Multiple pur=multiple absolu=supragénérique=infiniment infini=unique=tout=libre

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Messagepar alcore » 11 juin 2009, 11:35

hokousai a écrit :


( encore qu'il ait aussi affirmé que la substance et ses modifications c'était la même chose , mais vous ne voulez lire que ce qui va dans votre sens..... à ce sujet le court traité n'est pas la priorité )

............................... )


La substance de toute évidence diffère de toute l'étendue du ciel de ses modes (à titre d'effets,c ar la cause est toujours distincte de sa cause, EthI,16)

Les modes sont dans la substance comme en autre chose. Le fait que les modes soient DANS la substance ne veut pas dire que tout ce qui est est divin ! Etre EN Dieu et etre Dieu, ce n'est pas la même chose,même si Dieu n'existe que dans et par la position de l'infinité des modes qui, selon certaines lois (lunivers) explicitent sa puissance et son essence.

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Messagepar alcore » 11 juin 2009, 11:40

hokousai a écrit :

difficile d'affirmer que l' idée d' attribut n'est pas un universel puisqu' elle pointe une qualité commune..... aux attributs ( ce qui constitue en genre l'ensemble des attributs )


Les attributs sont par rapport auxmodes une nature commune à toutes les choses finies, et en ce sens, si vous voulez, ce sont des qualités. C'est la définition mathématique de l'attribut

Mais les attributs sont aussi des causes par rapport aux modes comme effets, dans ce cas ce ne sont plus des qualités communes, ce sont des expressions déterminées de la substance. C'est la définition dynamique.

Or un universel, comme il est connu de soi, ne peut être cause. En fait, l'attribut cause présuppose une certaine nature commue à tous les effets qu'ilproduit; ce qui veut dire: un effet ne peut être produit qu'au sein d'un univers, manifestation d'une loi.
Mais à l"inverse une nature ne peut être commune que si elle est posée par une causalité efficiente. Dans ce cas c'est l'aspect dynamique qui est premier; l'entrelacement des deux formes constitue la causalité immanente de l'attribut.


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