Messagepar Vanleers » 28 juin 2015, 16:17
Bergson, dans un texte souvent cité, a, lui aussi, écrit qu’à un bon entendeur de l’Ethique, un mot suffit :
« Je ne connais rien de plus instructif que le contraste entre la forme et le fond d’un livre comme l’Ethique : d’un côté ces choses énormes qui s’appellent la Substance, l’Attribut et le Mode, et le formidable attirail des théorèmes avec l’enchevêtrement des définitions, corollaires et scolies, et cette complication de machinerie et cette puissance d’écrasement qui font que le débutant en présence de l’Ethique, est frappé d’admiration et de terreur comme devant un cuirassé de type Dreadnought ; de l’autre, quelque chose de subtil, de très léger et de presque aérien, qui fuit quand on s’en approche, mais qu’on ne peut regarder, même de loin, sans devenir incapable de s’attacher à quoi que ce soit du reste, même à ce qui passe pour capital, même à la distinction entre la Substance et l’Attribut, même à la dualité de la Pensée et de l’Étendue. C’est derrière la lourde masse des concepts apparentés au cartésianisme et à l’aristotélisme, l’intuition qui fut celle de Spinoza, intuition qu’aucune formule, si simple soit-elle, ne sera assez simple pour exprimer. Disons, pour nous contenter d’une approximation, que c’est le sentiment d’une coïncidence entre l’acte par lequel notre esprit connaît parfaitement la vérité et l’opération par laquelle Dieu l’engendre, […] » (La Pensée et le mouvant)