Réalité du troisième genre de connaissance ?

Questions touchant à la mise en pratique de la doctrine éthique de Spinoza : comment résoudre tel problème concret ? comment "parvenir" à la connaissance de notre félicité ? Témoignages de ce qui a été apporté par cette philosophie et difficultés rencontrées.
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Henrique
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Messagepar Henrique » 08 avr. 2012, 09:18

Rapidement sur la forme, à Hokousai : je pensais en effet que vous continuiez de discuter de l'interprétation de Spinoza et non en philosophie générale. Quant au ton que j'employais, je ne sais pas à quoi vous faites référence exactement. En tout cas, l'esprit dans lequel j'écrivais était la conscience que la thèse que je défend me semble assez difficile à concevoir en raison de son caractère peu usuel, et donc pas que vous seriez de mauvaise volonté ou je ne sais quoi de négatif contre vous.

Sur le fond, il me semble que la distinction que je faisais entre deux types de présent répond à vos objections au moins en ce qui concerne le propos de Spinoza. Par présent, on entend ordinairement ce qui est donné actuellement. En Dieu, il y a une infinité de modes qui sont des variations d'une même puissance d'exister. Ces modes peuvent être distingués les uns des autres bien qu'ils ne soient pas séparés ontologiquement et partant, on pourra distinguer des moments comme des lieux différents mais qui rapportés à la substance ne sont pas plus ontologiquement différents que ne le sont les modes.

Je n'explique pas ici l'éternité à partir de la durée mais bien la durée à partir de l'éternité : ainsi ce qu'il y a de positif dans l'idée inadéquate de la durée d'un corps n'est pas supprimé par l'idée adéquate de son éternité : "Rien de ce qu'une idée fausse contient de positif n'est détruit par la présence (praesentia) du vrai, en tant que vrai." (E4P1). Aussi je pense qu'en opposant éternité et durée au point où le faites, en disant que ce qui est présent relèverait uniquement de l'illusion par opposition à la vérité éternelle, c'est la compréhension même du fait que les choses nous apparaissent dans une certaine durée qui devient incompréhensible.

Shub a tendance il me semble à expliquer l'éternité à partir de la durée, comme durée infinie. Vous avez tendance à les opposer radicalement. Moi j'aurais plutôt tendance à expliquer la durée à partir de l'éternité : comme on peut distinguer le passage du rouge au jaune dans l'arc-en-ciel dans un même moment, je dis que le passage du coup de marteau sur la cloche au son est en fait du même ordre. Ce qui revient il est vrai à faire de la durée une sorte de quatrième dimension de l'étendue, quoiqu'elle vaut en même temps pour n'importe quelle dimension.

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hokousai
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Messagepar hokousai » 09 avr. 2012, 00:45

cher Henrique

On peut être Kantien ou de n'importe quelle école et essayer de comparer objectivement Spinoza et ce que quiconque ici en dit. Le kantien peut monter à un spinoziste qu'il se trompe sur Spinoza sur tel ou tel point . Ce qui est très différent de tenter de montrer que Spinoza se trompe ( position, par exemple, de Libr )
A partir du 04/04/2012 00:08 je débats de VOS idées en les comparant à ce que je crois être de celles de Spinoza et pas en les comparant aux miennes.cher Henrique

On peut être Kantien ou de n'importe quelle école et essayer de comparer objectivement Spinoza et ce que quiconque ici en dit. Le kantien peut monter à un spinoziste qu'il se trompe sur Spinoza sur tel ou tel point . Ce qui est très différent de tenter de montrer que Spinoza se trompe ( position, par exemple, de Libr )
A partir du 04/04/2012 00:08 je débats de VOS idées en les comparant à ce que je crois être de celles de Spinoza et pas en les comparant aux miennes.
Je compare votre interprétation (de Spinoza ) à la mienne et j'ai essayé de ne pas faire intervenir d' idées personnelles trop différentes de celles de Spinoza.
.................................................
Je reproche le ton ...oui .
Si vous en avez contre le présentéisme ne nous impliquez pas Shub et Moi parce que vous nous avez sous la main. Shub professe une sorte d' éternalisme et moi de même. De plus nous sommes en accord sur les fondamentaux de la doctrine et suffisamment pour ne pas être rangés dans le camp de l' adversaire principal parce qu'il vous semble qu'il en existe un.
..................................................
Sur le fond
Si mes critiques vous semblent injustes ou mal justifiées, expliquez- vous ( patiemment ). Préféreriez- vous ne pas en rencontrer ?

sur le temps et la durée je vous soumets le texte suivant ( qui est ce que je pense que Spinoza pense ) Vous pouvez donc critiquer mon interprétation

Le temps et la durée sont distingués par Spinoza . Le temps est de la mesure et est de l'imagination.
la durée est indivisible,"conti­nua­tion indé­fi­nie de l’exis­tence", l'idée de durée est une idée claire et distincte.

L'essence actuelle d'une chose c'est l'effort pour persévérer . Tel mode existe . Le mode a une puissance actuelle il est cet effort de persévérer . Et tant qu''il persévère
1) il est dans la présence de l'observateur .( affections du corps humain /l'esprit humain )
2) il est objectivement dans une présence de durée indéfinie indépendamment de l'observateur.

Mais ce n'est pas la durée qui explique l' effort. L'effort est expliqué par la nature des choses comprises ainsi par la raison. Outre le conatus les choses ont une essence (ou nature propre de telle ou telle chose ) et l'essence est causée par Dieu ( voir la prop 22/5)
. On peut identifier essence et conatus le point important est qu'elles ( les choses ) persévèrent .(et j' identifie essence et conatus)

Dieu ne connait pas antérieurement l'idée des choses (essence de leur nature singulière ) cette idée d'essence et puis celle du conatus permettent d'expliquer :
1) d' expliquer que les choses peuvent durer et qu'une présence ou une actualité puisse exister .

2) de concevoir les choses sous une espèce d'éternité.
L'idée permet d' expliquer mais sans l' effort il n'y en aurait pas l'idée . Le conatus est objectivement cause de son idée . Or le conatus renvoi à une certaine nécessité d' exister sous le régime du conatus , qui plus est renvoie à une essence ( une nature propre de la chose qui s' efforce ).On sort absolument du régime de la durée .

En conclusion la durée existe indéfinie le présent existe indéfini mais ils n 'expliquent pas la stabilité des choses . L idée de présent ne doit pas s'expliquer par le temps mais par l effort ( conatus ).C' est parque les choses persévèrent indéfiniment que le présent est constitué.
Le présent est imaginaire s'il est compris comme le lieu temporel substantiel où les choses apparaissent .

Une fois la chose détruite, elle n'a plus de présence . Seule Dieu /la nature( indestructible) a une présence, de par sa nature . Son effort de persévérer est d' une puissance infinie et Dieu est en acte.
Voila pourquoi je ne suis pas d'accord avec votre éternalisme .
( sans compter les grandes difficultés à me le représenter et d'autres raisons logiques, déjà expliquées)

je ne suis pas le seul à penser ainsi j' ai lu chez Chantal Jacquet ceci : Quand bien même on irait au-delà de la simple immortalité pour imputer aux chose crées une durée sans commencement ni fin, quand bien même elles existeraient de toute éternité, pour reprendre l"expression consacrée, elle ne seraient pas éternelles .page 147( les expressions de la puissance d'agir chez Spinoza )
Je compare votre interprétation (de Spinoza ) à la mienne et j'ai essayé de ne pas faire intervenir d' idées personnelles trop différentes de celles de Spinoza.

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Re: Réalité du troisième genre de connaissance ?

Messagepar hokousai » 23 févr. 2014, 15:31

à Henrique

Je reviens sur une ancienne discussion
Henrique a écrit :Et il y a l'autre éternalisme que vous semblez avoir tant de mal à intégrer et qui consiste à dire que ce qui ne change pas, c'est cela même qui paraît changer parce que nous n'avons qu'un point de vue partiel sur la réalité. Ce n'est plus le ciel qui est éternel, par opposition à une terre qui serait le lieu de la mort et de la contingence ; il n'y a dans l'éternalisme que je prétends trouver chez Spinoza qu'une seule réalité, un seul monde, une seule nature où tout se tient éternellement et dans laquelle il n'y a qu'affirmation et jamais de négation réelle. Se placer de ce point de vue, au moins quelques heures, c'est voir tomber une à une toutes les difficultés qu'on croit habituellement apercevoir au niveau de la cohérence globale du spinozisme. Et c'est aussi résoudre de nombreuses apories classiques, datant de Zénon d'Élée, sur la nature du temps, du mouvement et de l'infini.


Ce que je critiquais me semble -t-il, c'est le déterminisme plus ou moins latent. Ce n'est pas l' éternalisme tel que vous le concevez mais quelques implications logiques.
D' 'où ma critique sur les causes et les effets.
Pourquoi il y a -t-il rémanence des causes et des effets ? Et bien parce qu'il y a une flèche du temps. II n'y a pas symétrie.
Même si causes et effet sont soupçonnées de ne pas exister en soi il y a toujours une flèche du temps, une asymétrie.

Et il y a difficulté à comprendre :
une seule nature où tout se tient éternellement
. Car on ne comprend pas qu' à égalité tout le passé et tout l'avenir se tiennent ensemble. Car partout règne l'inégalité entre cause et effet. Il n' y a pas égalité dans le positif .

Si on le comprend alors il n'y a plus ni passé ni avenir donc pas de causes et d' effets et pas de déterminisme. La difficulté est posée et maintenue par Spinoza même qui nonobstant son éternalisme ( que je veux bien ) maintient le déterminisme.
Ou alors il faut repenser ce déterminisme qui tend à laisser penser que tout est écrit d'avance...il faut réintroduire la liberté de Dieu.

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Re: Réalité du troisième genre de connaissance ?

Messagepar hokousai » 08 mai 2014, 01:40

à Henrique

Je redis que je partage ce que vous dîtes
à savoir ceci
Ce n'est plus le ciel qui est éternel, par opposition à une terre qui serait le lieu de la mort et de la contingence ; il n'y a dans l'éternalisme que je prétends trouver chez Spinoza qu'une seule réalité, un seul monde, une seule nature où tout se tient éternellement et dans laquelle il n'y a qu'affirmation et jamais de négation réelle.


Je n'ai pas envi de relire là ce que j écrivais en 2012.. J'ai sans doute évolué ...mais je ne suis pas au bout de certaines peines.
Je me refuse à tomber dans le temporalisation deleuzienne ( guère différente sur le fond de l' hégélianisme )
Mais ma compréhension de la flèche du temps est assez confuse.
Il reste un problème.
Ce peut être l'illusion d'un problème, encore faut -il expliquer l' illusion.

Tut
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Re: Réalité du troisième genre de connaissance ?

Messagepar Tut » 23 nov. 2016, 19:02

Ce genre de connaissance au-dela de la raison m'était obscure également. Jusqu'à la pratique de la méditation Vipassana.

Je crois qu'il parle d'une connaissance liée à l'expérience. La connaissance intellectuelle des lois de la nature est simple, elle aide mais ne guérit pas. Il faut aller plus loin en expérimentant ces lois de la nature, en appréhendant la réalité telle qu'elle est vraiment par l'expérience.

Pour expliquer la différence, j'aime utiliser cet exemple :

Nous savons tous de manière sure que nous allons mourir un jour, pourtant à l'instant t, nous avons l'impression d'être immortel.
Intégrer, réaliser pleinement cette connaissance (3eme genre de connaissance) est plus efficace que juste la comprendre intellectuellement (2eme genre de connaissance).


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